"Je suis très triste. J’ai de la peine aussi pour mon fils et mes trois petites-filles. C’est très dur de perdre une mère, comme une grand-mère. Nathalie a été ma première femme et la seule Mme Delon. On s’est mariés en 1964. On était restés constamment en contact. On se voyait souvent. Je faisais partie de sa vie, elle faisait partie de la mienne. Nous étions encore ensemble à Noël. Nous avons fait des photos ensemble, les dernières..." Le bouleversant message d’adieu d’Alain Delon dit tout des liens indéfectibles qui l’unissaient à Nathalie.
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À sa suite, toute la famille a réagi. Anthony en premier, le fils du couple, tant aimé, né à Los Angeles à l’issue d’une lune de miel californienne qui durera un an : "R.I.P maman", a-t-il sobrement écrit sur les réseaux sociaux. Une pudeur aussi "delonienne" que son message transmis à l’AFP : "Ma mère est décédée ce matin à 11 heures, à Paris, entourée de ses proches..." Aussitôt son frère et sa sœur lui ont manifesté leur affection. "Repose en paix. Une femme forte, une mère forte. Sois fort mon frère...", a déclaré Alain-Fabien. Quant au sublime portrait publié par Anouchka Delon, il est accompagné de cette sentence si juste : "Lionne jusqu’au bout..." 1964, une comète passe dans le ciel d’Alain Delon.
Un amour incandescent, fulgurant...
Cette beauté féline entre par effraction dans la vie de l’acteur lors d’une soirée en boîte de nuit. Interviewée en 1965 par Alain Cavalier pour Dim Dam Dom, Nathalie Delon raconte amusée leurs premiers instants : "Ça a été une rencontre assez violente, je dois dire, entre nous deux. Il a été très grossier. Il s’était assis sur mon sac, avec des amis à lui que je n’aimais pas tellement, qui avaient un drôle de genre. On m’a dit, Alain Delon est là. Ah bon ? Il est beau, en effet, je l’ai regardé..." Malgré sa froideur apparente, Alain succombe à son charme : "La première chose qui me saute aux yeux en pensant à Nathalie, ce sont précisément ses yeux", réplique-t-il.
Entre eux, c’est l’amour fou. Un mariage dès le 13 août de la même année, puis un voyage de noces aux États-Unis qu’ils gagnent à bord du paquebot France. Le mythique vaisseau emporte l’idole du cinéma français, au faîte de sa gloire et de son charme, pour un long séjour d’un an sous le soleil de Californie. Où naît leur fils Anthony, dont les yeux verts cumulent la beauté irréelle de ceux de ses deux parents.
Au temps du bonheur, auprès de ses "cow-boys" Alain et Anthony, en 1966. Le garçonnet, né à Los Angeles, est alors âgé de 2 ans. © PICOT/ STILLS/ Gamma-Rapho via Getty Images
De temps en temps, le fantôme de Romy Schneider s’invite cependant dans leur relation. "Alain ne me parlait jamais d’elle, mais je voyais, de temps en temps, une ombre de tristesse passer dans son regard", lâche alors Nathalie Delon. Mais plus que cette présence indélébile, le déclin du couple semble lié à d’autres causes. Peut-être ont-ils surtout eu le tort de vouloir partager le même univers, celui du cinéma, dont il était déjà le roi, et dans lequel il fait entrer Nathalie en 1967. À l’écran, elle devient Jane Lagrange, la maîtresse de Jeff Costello, le tueur à gages qu’incarne Delon dans Le Samouraï de Melville.
Était-il raisonnable de vouloir fusionner leurs sphères d’influence ? De laisser entrer l’autre fauve sur son propre territoire si durement conquis ? Toujours est-il que le couple divorce dès 1969, quelques mois avant que l’acteur croise Mireille Darc sur un plateau de cinéma. Nathalie Delon ne disparaît pas pour autant. Si sa carrière sur grand écran se prolonge en demi-teinte jusque dans les années 1980, elle incarne avant tout la femme libre des années 1970. Une personnalité solaire et passionnée, icône tropézienne qui mord la vie à pleines dents. Elle reste en cela fidèle à la soif d’absolu en laquelle Delon s’était reconnu.
L’image inoubliable du couple Delon dans "Le Samouraï" de Jean-Pierre Melville. © Bridgeman Images
Leur passion incandescente fut aussi brève qu’inoubliable. Un amour fulgurant bâti sur une âpre relation, où les moments de tendresse sont encadrés de luttes homériques. Le petit reportage d’Alain Cavalier en atteste. "Alain est Scorpion, je suis Lion, confesse Nathalie. Entre eux, c’est le pot de fer contre le pot de fer, ça fait des étincelles, mais c’est bien plus passionnant." Alain Delon, qui aime sans doute que la belle effrontée lui tienne tête, renchérit aussitôt : "Oui, c’est un peu vrai, mais il n’y a pas de solution, car le pot de fer se couvre de bosses mais ne casse jamais." Et Cavalier de demander à l’acteur : "Tu l’aimes beaucoup ?" Lui : "Beaucoup, c’est un faible mot..."
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