Il est 16 heures pile au château de Tratzberg, un joyau Renaissance situé au nord-est d’Innsbruck. C’est ce paysage de carte postale, où l’on ne s’étonnerait pas de voir surgir Sissi en train d’effrayer les chevreuils, que son arrière-arrière-arrière-petite-nièce Gabriella de Habsbourg-Lorraine a choisi pour son mariage, le 12 septembre dernier. Une seule condition cependant pour que les noces puissent avoir lieu, en ces temps de Covid-19: que toute la cérémonie puisse se dérouler en extérieur. Gabriella n’en a pas dormi de la nuit. La veille encore, la petite icône de son smartphone annonçait des orages en milieu d’après-midi, à point pour gâcher le début de la messe.

Finalement, le jour J, pas un nuage ne vient troubler le bleu du ciel: chaussés de lunettes de soleil et dûment équipés de leur livret de messe, transformés en éventail, les invités –une centaine, pas plus–, rassemblés dans la cour du château, guettent avec impatience la procession d’entrée bientôt annoncée par La Marche du prince du Danemark, de Jeremiah Clarke. Elle commence par les huit enfants d’honneur: vêtus aux couleurs de la Bavière, Dirndl pour les filles et Lederhose pour les garçons. Au milieu de cette équipe joyeusement indisciplinée, la fille des mariés, la princesse Victoria, semble un peu intimidée. Pas pour longtemps.

À peine installée sur sa chaise, dans le chœur, la petite fille qui fêtera ses 3 ans le mois prochain ne résiste pas à l’envie de courir retrouver son père, qui vient d’arriver devant l’autel. La voilà sur ses genoux pour écouter le lied entonné par l’un des petits chanteurs du Chœur de garçons de Wilten et guetter fébrilement l’entrée de la mariée au bras de son père, Carl Christian de Habsbourg-Lorraine. "Victoria est venue avec nous devant l’autel et ne voulait plus nous quitter, c’était très touchant, presque un mariage à trois", avoue la reine du jour.
Dans l’assistance, on reconnaît le couple héritier, Guillaume et Stéphanie de Luxembourg, jeunes parents du prince Charles, né en mai dernier. En plus d’être l’arrière-petite-fille du dernier empereur d’Autriche, le bienheureux Charles Ier, Gabriella est aussi l’une des nièces de l’actuel souverain luxembourgeois.
La pandémie n'a pas gâché la fête
Même si les deux familles sont proches et les mariés cousins issus de germain, Henri a moins de chance. Son père, le prince Éric de Bourbon-Parme, est resté coincé en Floride. Alors, pour lui faire une place dans l’assemblée, l’un de ses frères n’hésite pas à égratigner le protocole pour tenir haut son smartphone rouge, pendant toute la messe.
Depuis les États-Unis, c’est donc un père ému qui peut suivre en live le mariage de son petit dernier, écouter religieusement l’échange des consentements et même sursauter, comme le reste de l’assemblée, aux coups de fusil tirés par la compagnie autrichienne de Schützen, afin de ponctuer le "oui" des mariés! "Nous pourrions nous remarier à nouveau, juste pour nous redire ces mots", confie Gabriella, particulièrement émue par cet instant.

Ce sont les Schützen de Stans, venus du village voisin, qui forment une haie d’honneur pour entourer la sortie des tout jeunes époux… avant de partager avec eux un réconfortant verre de schnaps! "Une tradition autrichienne typique, avant que je n’entre dans les valeurs danoises", souligne Gabriella. Rien de tel pour affronter la suite des festivités: un savoureux cocktail où la bière bavaroise König Ludwig –cadeau de mariage du parrain d’Henri–, coule à flots, puis le dîner viennois et sa monumentale sachertorte en dessert.

À 23 heures, la mariée et son père ouvrent le bal sur une valse viennoise. À peine a-t-elle changé de partenaire pour esquisser ses premiers pas de danse avec son mari, qu’elle se retrouve cernée par quelques cousins et amis d’Henri, bien décidés à faire honneur à ses origines danoises: après avoir soulevé le marié sur leurs épaules, ils lui confisquent ses chaussures et lui coupent l’extrémité de ses chaussettes, une coutume destinée à garantir la fidélité de l’époux, qui aurait plus de mal à jouer les séducteurs avec des chaussettes trouées…
Un nouveau costume qui ne l’empêche pas de recommencer à danser et de savourer cette fête dont chacun profite avec d’autant plus de cœur qu’elle met fin à des mois d’isolement et d’éloignement familial. "C’est comme si le soleil, en brillant de toutes ses forces, avait conforté notre choix et protégé notre union", conclut la jeune mariée.
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