Entretien exclusif avec le prince Pavlos de Grèce : "Nous sommes là pour aider notre pays à avancer"

Il est le nouveau chef de la maison royale de Grèce, mais se présente comme chef de famille, décidé à veiller sur l’exemplarité de ses proches, en douceur comme le permet son caractère. Au lendemain de la cérémonie des quarante jours marquant la fin du deuil orthodoxe du roi Constantin, le prince Pavlos nous a reçus à Athènes pour un entretien exclusif, au cours duquel il remercie le peuple grec de son soutien et assure qu’il sera désormais plus présent sur sa terre natale. 

Par Marie-Eudes Lauriot Prévost - 22 février 2023, 06h21

 Le prince Pavlos de Grèce entouré de son fils aîné, le diadoque Constantin, et de son épouse, la princesse Marie-Chantal, avec en arrière-plan, l’Acropole d’Athènes.
Le prince Pavlos de Grèce entouré de son fils aîné, le diadoque Constantin, et de son épouse, la princesse Marie-Chantal, avec en arrière-plan, l’Acropole d’Athènes. © David Atlan

Comment avez-vous ressenti il y a un mois la cérémonie des obsèques de votre père le roi Constantin II, entouré par tant de représentants des familles royales ? 

Au départ, nous ne savions pas à quoi allait ressembler la cérémonie, des funérailles d’État ou un événement privé. Lorsque cette seconde option a été décidée, j’ai expliqué rapidement que la sœur de mon père étant reine consort d’Espagne et mère du roi, et la sœur de ma mère reine de Danemark, il y aurait forcément des délégations officielles. Quant au reste de la famille, je ne savais pas qui répondrait présent, mais quoi qu’il en soit, nous étions apparentés à la plupart des maisons royales d’Europe. Nous avons été très honorés de recevoir huit représentants de familles royales pour rendre hommage à mon père. Nous sommes tous proches les uns des autres, et c’est bien que nous puissions nous retrouver pour les moments heureux comme malheureux. Je crois que tous ont été impressionnés par la qualité de la cérémonie. L’archevêque Hiéronyme II, chef de l’Église grecque, a choisi de la célébrer selon la tradition du rite byzantin, chantée par les prêtres et le chœur. Ce fut une liturgie très belle et sereine, inhabituelle pour beaucoup.

Pavlos et Anne-Marie de Grèce aux funérailles de Constantin II de Grèce en la cathédrale métropolitaine de Grèce.
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Tant de familles royales pour vous entourer… 

Ce fut un honneur, pour mon père comme pour nous, d’être entourés par ces familles royales. Naturellement nos cousins proches d’Espagne et de Danemark, mais aussi celles de Suède, de Norvège, de Belgique, des Pays-Bas, de Monaco, de Grande-Bretagne. La famille royale anglaise a toujours été proche de mon père et nous avons été heureux d’avoir la présence de la princesse Anne. Le roi Charles a repris la tradition de sa mère de ne pas venir aux funérailles à l’étranger. 

Avez-vous été surpris par la ferveur des Grecs ? 

Oui. Et nous sommes humbles au regard du monde venu rendre hommage à mon père dès le petit matin. Je sais que beaucoup n’ont pu passer par la chapelle Agios Eleftherios où son corps reposait, puisque la cérémonie commençait à 11 heures. Nous aurions aimé leur accorder une journée entière, mais cela n’a pas été possible. Ce qui est intéressant à noter, c’est la présence de beaucoup de jeunes dans la foule, pas seulement des connaissances de mon père. Sûrement parce qu’ils ont compris qu’il s’agissait d’un événement historique. Mon père a été le chef d’État, le roi, un médaillé d’or aux jeux Olympiques. Beaucoup ne le connaissaient pas, mais ils ont tenu à rendre hommage à une personnalité, une part de l’histoire grecque. 

Si vous n’aviez à garder qu’une image de cette journée du 16 janvier, quelle serait-elle ? 

La sérénité. Bien sûr, perdre son père est éprouvant, mais recevoir autant de paix et d’amour de la part de tous nous a vraiment réconfortés. Spécialement ma mère qui a vécu presque soixante ans avec mon père. Quel soutien d’avoir été entourés de toutes nos familles. Plus tard à Tatoï, ravagé il y a deux étés par de terribles incendies, ce fut presque surréaliste. Cette cérémonie au soleil couchant dans une forêt où seuls quelques arbres restent debout a rajouté une atmosphère quasi mystique qui nous a soudés un peu plus encore. 

À l’issue de la cérémonie très recueillie de la Mnimosino, le prince Pavlos, son épouse la princesse Marie-Chantal et le diadoque Constantin se retrouvent dans une suite de l’Hôtel Grande-Bretagne, au centre d’Athènes.
À l’issue de la cérémonie très recueillie de la Mnimosino, le 18 février, le prince Pavlos, son épouse la princesse Marie-Chantal et le diadoque Constantin se retrouvent dans une suite de l’Hôtel Grande-Bretagne, au centre d’Athènes. © David Atlan

Comment va votre mère ? 

Elle va bien, même s’il lui faut commencer une nouvelle vie, sans celui avec qui elle a tout partagé pendant soixante ans. Notre famille fait bloc. Il y a toujours l’un d’entre nous auprès d’elle. Mes deux sœurs Theodora et Alexia se sont débrouillées pour rester avec elle quelque temps. Mon frère Nicolas vit ici, mon autre frère Philippos et moi-même faisons des allers-retours. 

Qu’avez-vous à dire au peuple grec pour sa présence en ces moments difficiles ? 

Merci pour le respect qu’il nous a témoigné, à mon père et à nous. Que les gens soient monarchistes ou non, ce n’est pas la question. Ils ont rendu hommage à un personnage historique. Au nom de ma famille, je les remercie du fond du cœur. Quel soutien vos tantes Sophie et Irène vous ont-elles apporté ? Elles étaient là dès l’hospitalisation de mon père et sont très présentes depuis. La reine Sophie et la princesse Irène étaient très proches de mon père et il va beaucoup leur manquer. 

Que symbolise cette cérémonie de fin de deuil ? 

En Grèce, la période de deuil est scandée par plusieurs célébrations, aux troisième, neuvième et quarantième jours. Puis chaque année pour l’anniversaire du deuil. Lors de cette cérémonie des quarante jours appelée Mnimosino, une koliva est placée au centre de l’assemblée. Cette préparation sucrée à base de blé entier est bénie par le prêtre, puis partagée entre tous les invités comme le veut la tradition. 

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Vous êtes le nouveau chef de la maison royale de Grèce. Comment envisagez-vous ce rôle ? 

Dans mon cas bien sûr, j’hérite ce rôle de mon père, sans qu’il soit lié à quelconque responsabilité au niveau de l’État, simplement au niveau familial. Mon rôle va être de préserver l’exemplarité de la famille. Et d’encourager ma propre famille à assumer son rôle dans le futur. J’ai la chance d’avoir à mes côtés mon épouse Marie-Chantal, une femme formidable qui a élevé les plus fabuleux des enfants. Nous allons continuer dans cette voie : être soudés et garder des liens forts avec notre pays. J’ai eu la chance d’avoir pu jusqu’à présent mener une existence indépendante, au cours de laquelle j’ai bâti il y a vingt ans ma propre entreprise dans la finance. Cela me permet d’être productif et autonome dans un monde moderne. Grâce à cette expérience, combinée à mon éducation et au service militaire, je me sens prêt à assumer ce nouveau rôle. 

Quelles valeurs vos parents vous ont-ils transmises ? 

La plus importante, qu’ils partageaient tous les deux, est celle de garder une famille unie. Ils y sont parvenus puisque nous sommes proches les uns des autres avec mes frères et sœurs. Et je crois que nous avons la même chance avec nos propres enfants. Au-delà, je suis attentif à entretenir l’amitié avec mes cousins et mes oncles et tantes. Et bien sûr, mes parents nous ont enseigné le respect de notre pays, de la religion, de certaines traditions auxquelles nous tenons. Et aussi le devoir de redonner à la nation autant que nous le pouvons. D’être quelqu’un de bien et de gagner sa vie de façon respectable. De nos jours, porter un titre de prince héritier ou de monarque régnant amoindrit les problèmes d’intendance. Mais quand vous vivez dans le monde normal, vous devez combiner deux vies qui ne sont pas toujours compatibles. 

Quelle place aimeriez-vous occuper dans la société grecque ? 

La même que celle d’aujourd’hui. Je ne changerai jamais rien à mon attitude. Les gens me verront comme je suis : le chef de famille, mais je reste Pavlos pour tout le monde. 

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Directrice de la rédaction

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