Sous la coupole centrale de la cathédrale Saint-Alexandre-Nevsky, les fiancés baisent chacun la couronne qui va être placée au-dessus de leur tête. Puis Son Éminence le métropolite Jean de Doubna, archevêque des églises orthodoxes russes en Europe occidentale, prononce les premiers mots du sacrement de mariage : "Le serviteur de Dieu Rostislav est couronné par la servante de Dieu Foteini et la servante de Dieu Foteini est couronnée par le serviteur de Dieu Rostislav…"
Couronne de joie par quoi les époux ne font qu’un, couronne royale du couple initial, à la source d’une nouvelle lignée, couronne des martyrs, c’est-à-dire des témoins de la foi. "Seigneur Dieu, couronne-les de gloire et d’honneur", lance à trois reprises monseigneur de Doubna.
La cérémonie de mariage est présidée par monseigneur Jean de Doubna, coiffé de la mitre de métropolite, et archevêque des églises orthodoxes russes en Europe occidentale. © David Atlan
Dirigé par le protodiacre Alexandre Kedroff, le chœur de la cathédrale fait souffler sous les voûtes séculaires le charme hypnotique des litanies orthodoxes russes. Le regard du prince Rostislav Romanov se perd un instant dans les hauteurs du dôme et les volutes d’encens. Élevé en Grande-Bretagne, vice-président de la Romanov Family Association, il est le premier de sa famille à être revenu vivre en Russie, même s’il est aujourd’hui basé dans le Kent. Il habitait encore Moscou en 2011, lorsqu’il a assisté à ce bal russe de Londres qui allait changer sa vie.
Un coup de foudre et une séparation
"Le président du bal nous a présentés sans crier gare", confiait Foteini Georganta à Point de Vue, l’avant-veille du mariage. "Rosti était charmant, il était perdu et d’une douceur incroyable. Son attention était très flatteuse, mais il faisait terriblement jeune." Pour Rostislav, cette première valse "est un instant prodigieux".
Coup de foudre immédiat, mais l’artiste bohème qui vit pour sa peinture est "lent à changer". Lorsque Foteini attend leur fils Rostislav-George, en 2013, les amoureux se séparent. "Je devais vaincre mes démons et mes addictions, si je voulais être là pour lui." Rostislav y parvient et devient le meilleur ami de Foteini. Jusqu’à ce que l’amour entre eux s’impose de nouveau comme une évidence.
Avant d'épouser Foteini, Rostislav Romanov a dû se débarrasser de ses vieux démons. © Anna Roussos & Thanos Assfis
Qui les réunit en ce dimanche 12 septembre 2021 à Paris pour la célébration de leur mariage religieux, avec leurs familles et une centaine d’invités. "L’heure ne nous semble pas aux grands événements, alors que le monde entier a été bouleversé par la pandémie qui a emporté mon frère aîné en avril", explique Foteini. "C’est à Paris, cette ville bien-aimée et débordante de souvenirs pour nos deux familles que nous avons été conduits", poursuit Rostislav.
La mariée arbore un diadème de topazes et brillants, inspiré d’un modèle créé pour l’impératrice Maria Feodorovna. © Anna Roussos & Thanos Assfis
Il est 15h30 lorsque la voiture de la fiancée s’arrête devant les marches de la cathédrale. Orpheline de père, comme son futur époux, Foteini est accompagnée de son frère, Alexandre Georganta. Sa robe de soie ottomane, aux lignes pures, son long voile de coton de soie ont été dessinés par la princesse Chloé Obolensky avec qui a travaillé Foteini au théâtre, après ses études de dramaturgie, à Londres.
Son diadème de topazes bleues et de brillants, offert par le joaillier Petr Axenoff, s’inspire d’un modèle créé pour l’impératrice Maria Feodorovna, l’épouse d’Alexandre III. Il sera vendu aux enchères pour doter la Fondation Romanov Philanthropy que viennent de lancer Rostislav et Foteini en vue de promouvoir et sauvegarder l’art, la culture et l’artisanat russes.
La sortie des mariés sur le parvis de la cathédrale Saint-Alexandre-Nevsky est saluée par une pluie de riz et de pétales de rose. © David Atlan
Aux accents profonds du chant d’entrée, Il est digne de te célébrer, Ô mère de Dieu, les futurs époux ont gagné le lutrin dressé en avant de l’iconostase. Auprès d’eux, un petit page de 7 ans qui n’est autre que leur fils, Rostislav-George, porte les icônes familiales. Le premier rite est celui des fiançailles, avec les cierges remis au couple pour figurer la lumière du Christ, et la bénédiction de Rostislav et Foteini.
Dans l’assistance, on reconnaît notamment la princesse Dorit, veuve du prince Dimitri Romanovitch de Russie, la princesse Schakhovskoy et son époux, Thibault de Pradel de Lamaze, le prince et la princesse Constantin Mourousy, le comte et la comtesse Pierre Cheremetieff, le duc et la duchesse d’Uzès dont le fils aîné, duc de Crussol, fait partie des chafers ou porte-couronne des mariés, le prince et la princesse Sergei Obolensky, le comte et la comtesse Christian d’Andlau-Hombourg, Nikolaï Dobrynine et son épouse Soledad, le prince Carl-Philip de Croÿ, le comte Talon, Delphine Malachart des Reyssiers…
Les mariés lors du cocktail dans les jardins du cercle de l'Union interalliée. © Anna Roussos & Thanos Assfis
Une fois psalmodié l’Évangile selon saint Jean sur les noces de Cana, le métropolite présente trois fois le calice aux mariés en mémoire de la communion qui renouvellera leur amour. Puis, il lie leurs mains droites dans son étole et leur fait faire à trois reprises le tour du lutrin sur lequel reposent les Évangiles, la croix et les icônes du couple. Rostislav et Foteini reçoivent les ultimes bénédictions face à l’iconostase ouverte devant eux avant de s’embrasser et de recevoir les félicitations de l’assemblée.
Rostislav et Foteini rayonnent de bonheur
Le temps pour tous les invités de se changer, et la réception débute à 19h30 par un cocktail donné dans les jardins du cercle de l’Union interalliée. Queues-de-pie et robes longues. La mariée porte cette fois un diadème de brillants Art déco, qui lui vient de sa famille. Quant au prince, toute sa fantaisie de coloriste se retrouve dans les revers de son habit et ses chaussons de soirée.
Les mariés entourés de leur famille. © Anna Roussos & Thanos Assfis
Le dîner a lieu à l’étage, salon Foch, et s’ouvre sur une tradition russe, le karavaï, ou pain des mariés, présenté par les mères, lady Christia Ampthill et madame Haralambia Georganta. Rostislav et Foteini mordent ensemble dans le pain, symbole de leur nouvelle vie. Entre cappuccino d’artichaut et cazette, velouté d’épinard, roulé de cailles aux raisins Corinthe, sauce moscovite, se succèdent danseuses de ballets russes, musiciens tziganes et boyards venus offrir aux mariés une coupe en argent dans laquelle ils boivent tour à tour.
Il est 23h30 lorsqu’ils se dirigent vers la salle de bal où ils dansent la première valse, seuls au monde, avant de découper le gâteau décoré de broderies en sucre. Œuvre d’un pâtissier russe, il mesure un mètre trente, soit exactement la taille du fils de Rostislav et Foteini.
Après la première valse, ils découpent la pièce montée qui mesure un mètre trente, soit la taille de leur jeune fils. © Anna Roussos & Thanos Assfis
Bientôt, la piste de danse est envahie et les époux se laissent entraîner dans un tourbillon bienheureux....
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