Il est 11 heures, heure de Londres, lorsque les cloches de Big Ben résonnent. Pendant deux minutes, le Royaume-Uni plonge dans le silence, de Belfast à Cardiff en passant par Édimbourg. En ce 12 novembre 2023, le pays commémore Remembrance Sunday ou Dimanche du souvenir en français. Une cérémonie conduite au pied du Cénotaphe, dans le quartier londonien de Whitehall, par le roi Charles III, sa deuxième depuis son accession au trône le 8 septembre 2022. Arrivé quelques instants plus tôt, le souverain a pris place devant le célèbre monument de pierre blanche, aux côtés de son fils aîné le prince de Galles, de son frère le duc d’Édimbourg et de sa sœur la princesse royale.

Il s’agit pour les Britanniques et les citoyens du Commonwealth de saluer la mémoire des soldats morts pour la patrie depuis plus d’un siècle. "Le cénotaphe, qui signifie 'tombeau vide', a été inauguré en 1920 pour symboliser les pertes sans précédent subies pendant la Première Guerre mondiale. Il commémore aujourd'hui tous les membres des forces armées qui ont perdu la vie au cours d'un conflit depuis 1914", rappelle le palais de Buckingham.
L'hommage de Charles III à son grand-père George VI
Comme à son habitude, la reine Camilla se trouve au balcon du Ministère des Affaires étrangères, du Commonwealth et du Développement aux côtés de la princesse de Galles, toute en élégance dans un manteau Alexander McQueen, assorti d’un chapeau signé Philip Treacy et de boucles d’oreilles en diamants qui appartenaient à Élisabeth II. Sans oublier une broche en argent de la Fleet Air Arm dont Kate est la commodore-en-chef. Le duc et la duchesse de Gloucester, le vice-amiral sir Timothy Laurence et la duchesse d’Édimbourg sont également présents. Outre le traditionnel poppy ou coquelicot, l’épouse du prince Edward arbore sur sa robe l’insigne de casquette des Fusiliers, elle qui est la colonelle royale du 5e bataillon depuis 2007.


La Sonnerie aux morts retentit, interprétée par les Royal Marines. La tristesse se lit dans le regard de Charles III, debout face au Cénotaphe. Sa belle-soeur Sophie sort discrètement un mouchoir tandis que Kate semble particulièrement émue. Un sentiment qui gagne aussi bien les Windsor que les milliers de personnes réunies à Whitehall ce dimanche matin. Outre les quelque 10.000 vétérans et 800 membres du personnel des trois corps d’armée, figurent également le Premier ministre Rishi Sunak et ses prédécesseurs dont Liz Truss, Boris Johnson et Theresa May, et le chef du Parti travailliste et leader de l’opposition Keir Starmer.


Après avoir récupéré sa couronne de fleurs des mains de son super-écuyer, le lieutenant-colonel Johnny Thompson, le roi s’avance lentement pour la déposer au pied du Cénotaphe. "Le dessin est très proche de celui de la couronne produite pour Sa Majesté le roi George VI. Les 41 pétales de coquelicot, de style ouvert, sont fabriqués à partir d’un tissu collé et montés sur un arrangement de feuilles noires, comme c'est traditionnellement le cas pour le souverain", explique Buckingham. "En souvenir éternel", a ainsi écrit Charles III sur la carte qui l’accompagne.

Au nom de Camilla, son écuyer, le major Oliver Plunket, se charge de positionner la sienne, faite de 95 pétales de coquelicot, à côté de celle de son époux, suivi par le prince William, le prince Edward et la princesse Anne. Tous saluent avant de reprendre leur place. Le capitaine George Hopkins, écuyer du duc de Kent, est le dernier à remettre sa gerbe de poppies. Le cousin de la défunte reine Élisabeth est absent du Remembrance Sunday en raison de "problèmes de mobilité épisodiques", indique le journaliste du Sun Matt Wilkinson. Une décision prise "à contrecoeur" par Edward de Kent qui vient de passer la présidence de la Commonwealth War Graves Commission à la princesse royale après 53 ans de bons et loyaux services. "Il s’agit d’une organisation mondiale qui entretient des tombes de guerre dans 23.000 lieux répartis dans plus de 150 pays et territoires", peut-on lire sur le site de la CWGC parrainée depuis le 10 novembre par le roi Charles, une première depuis sa création.

Après une prière prononcée par l’évêque de Londres Sarah Mullally, l’assemblée récite d’une seule voix le Notre Père puis entonne le God Save The King. Si le souverain a accédé au trône il y a plus d’un an, son émotion est toujours intacte lorsque l’hymne national est chanté. Sans doute pense-t-il à sa mère, Élisabeth II, dont il a dévoilé la statue ainsi que celle de son père, le prince Philip, au Royal Albert Hall à l’occasion du Festival of Remembrance organisé la veille. Charles III et ses proches quittent le Cénotaphe au terme de vingt-cinq minutes d’une cérémonie poignante, laissant place à un défilé d’anciens combattants et de militaires. Marchant ensemble dans les rues de Londres, passé et présent ne font plus qu’un. Unis dans le souvenir.
