Pour la première fois, vraiment, la voilà reine. À l’instant où Camilla fait son entrée dans l’immense salle de bal du palais de Buckingham, ce 22 novembre au soir, tous les regards convergent vers elle. À l’occasion du premier dîner d’État du roi Charles III en l’honneur du président sud-africain Cyril Ramaphosa, elle porte une robe du soir de son créateur favori, Bruce Oldfield, déjà vue lors d’une séance photo pour Vogue, à l’occasion de son soixante-quinzième anniversaire.

Surtout, la reine consort arbore le diadème belge de saphirs d’Élisabeth II. Créé à partir d’un collier de la princesse Louise de Belgique, mariée au prince Philip de Saxe-Cobourg en 1875, ce joyau a été acheté aux enchères par Élisabeth II dans les années 1960. Le choix de cette parure est ainsi un hommage de Camilla à sa défunte belle-mère qui avait lancé l’invitation, honorée ce soir, par le président Ramaphosa.
Une histoire commune entre le Royaume-Uni et l'Afrique du Sud
Les Windsor se sont mobilisés pour cette soirée capitale. À commencer par le prince et la princesse de Galles. Catherine est sublime dans sa robe cape blanche à ornements de Jenny Packham. Elle porte son diadème favori, le Lover’s Knot, composé de 19 perles poires et issu de la collection de la reine Mary. Une parure qu’affectionnait Diana en son temps. Voici aussi le comte et la comtesse de Wessex, le duc et la duchesse de Gloucester, le duc de Kent… Il s’agit d’être au rendez-vous de la première visite d’État reçue par Charles en tant que souverain.

Le choix de Cyril Ramaphosa, président de l’Afrique du Sud, ne doit rien au hasard. D’une part, il aurait dû être reçu avec le même faste par Élisabeth II, en septembre, date initiale de cet événement. D’autre part, la "nation arc-en-ciel", dont l’histoire commune avec le Royaume-Uni fut parfois complexe, est l’une des plus importantes du Commonwealth et le premier partenaire commercial de la Grande-Bretagne sur le continent africain.

Avant le toast porté par le souverain, les 163 convives admirent la rigueur sans égale dont a fait preuve, comme toujours, le maître de la maison royale. Le vice-amiral Sir Tony Johnstone-Burt a vérifié avec une règle l’écart de 45 centimètres entre chaque hôte et l’alignement des six verres du grand service qui compte 4.000 pièces. Une fois chaque invité à sa place, le roi Charles III prend la parole.

Alternant humour et gravité, il se remémore le nom donné par Nelson Mandela à Élisabeth II, "Motlalepula [qui vient avec la pluie], plus une marque de respect envers la reine, qu’une boutade sur le mauvais temps que les Britanniques amènent avec eux", s’amuse-t-il. Plus sérieusement, le souverain assume les relations passées entre les deux pays. "S’il y a des éléments de cette histoire qui provoquent une profonde tristesse, il est essentiel que nous cherchions à les comprendre. Comme je l’ai dit cette année, nous devons reconnaître les torts qui ont façonné notre passé si nous voulons libérer le pouvoir de notre avenir commun." Le roi termine son allocution par ces mots : "Nkosi Sikelel ’iAfrika !", "Dieu sauve l’Afrique" en langue xhosa.
Les honneurs d'une visite d'État
Après la dégustation d’un Ridgeview blanc de blancs 2016, les invités s’émerveillent du menu, rédigé en français. Filet de barbue Gallieni, ballotines de faisan aux artichauts avec leur compote de coings et sauce au porto, panaché de carottes de Chantenay, chou frisé et potiron rôti ainsi que des pommes de terre fondantes. En dessert, parfait vanille et pommes caramélisées. Les vins font plus encore rêver avec un chassagne-montrachet premier cru Morgeot, Clos de la Chapelle, domaine duc de Magenta 2014, un château-feytit-clinet, pomerol 2000, et un sauternes château-rieussec premier grand cru classé. Sans oublier, pour la note finale et les amateurs, un porto Taylor’s Vintage de 1983.
Le faste déployé pour la visite du président sud-africain ne se limite pas au dîner ni aux ors du palais. La veille, déjà, peu après son installation à l’hôtel Corinthia, Cyril Ramaphosa a rejoint Horse Guards Parade, en Rolls-Royce, accompagné du prince et de la princesse de Galles. Là, se tient la cérémonie officielle de bienvenue aux côtés du roi Charles et de la reine consort.

Puis, le président et le couple royal remontent le Mall vers Buckingham dans le carrosse d’État irlandais. Après un déjeuner privé, ils découvrent dans la Picture Gallery de nombreux clichés et objets relatifs aux voyages de la famille royale en Afrique du Sud. Cyril Ramaphosa s’attarde sur le texte du discours d’Élisabeth II prononcé pour son 21e anniversaire au Cap ou, dans un registre plus léger, sur les photos des Spice Girls auprès du prince Charles et de Nelson Mandela, en 1997.

Retour à un aspect plus politique lorsque le président Ramaphosa, marque insigne d’amitié, est invité à prononcer un discours devant les membres du parlement, au palais de Westminster. Pas de quoi masquer, cependant, la trouble position du chef de l’État sud-africain. Soupçonné d’avoir fermé les yeux sur les détournements de fonds de son prédécesseur Jacob Zuma, Cyril Ramaphosa aurait en outre essayé de dissimuler à la police le cambriolage de son domicile, où trois millions d’euros en argent liquide auraient été dérobés… Cela ne l’empêche pas de se prévaloir du soutien de la majorité des membres de son parti, l’ANC, en vue des élections générales prévues l’année prochaine. Comme le dit le roi Charles, "Nkosi Sikelel ’iAfrica". Dieu sauve l’Afrique.
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