Charles et William : père et fils plus proches que jamais

Longtemps, William aura été un fils blessé, hanté par les chagrins de sa mère, distant avec son père. Longtemps, Charles aura accepté cet exil affectif, concentré sur le service de la Couronne, sa vie à rebâtir, son plus jeune fils à protéger. Harry est leur premier combat commun. Celui qui leur a permis de se rapprocher, de s’appuyer aujourd’hui l’un sur l’autre.

Par Antoine Michelland - 21 juin 2021, 10h54

 Comme le montre cette photo prise par la duchesse de Cambridge, c’est désormais Charles qui se repose sur son fils aîné. Avec confiance et tendresse.
Comme le montre cette photo prise par la duchesse de Cambridge, c’est désormais Charles qui se repose sur son fils aîné. Avec confiance et tendresse. Instagram @Clarencehouse

Voilà une image que nul n’aurait imaginée il y a seulement trois ans : Charles, hilare, posant sa tête au creux de l’épaule de son fils aîné, William, qui entoure son père d’un bras protecteur. Prise par la duchesse de Cambridge, cette photo de famille est débordante d’affection et de complicité, symbolique aussi de la mise en place progressive, naturelle, d’une inversion des rôles. Le prince de Galles, désormais, sait qu’il peut se reposer sur son héritier.

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Même s’il remonte à l’hiver 2019, avant la crise du coronavirus, le cliché en dit long sur une relation filiale complexe, longtemps contrariée avant que l’amour et la communauté de destin ne l’emportent sur les dissensions et les blessures affectives.

Le 1er mai 1962, le duc d’Édimbourg accompagne le prince Charles pour son entrée à Gordonstoun où le nouveau pensionnaire est accueilli par le président du bureau des directeurs de l’institution. © Keystone-France/Getty ImagesLe 1er mai 1962, le duc d’Édimbourg accompagne le prince Charles pour son entrée à Gordonstoun où le nouveau pensionnaire est accueilli par le président du bureau des directeurs de l’institution. © Keystone-France/Getty Images

William et Charles ont eu, tôt dans leur vie, le poids du monde sur leurs épaules. Mais chacun de façon très différente. Le fils aîné d'Élisabeth II et du prince Philip n’a pas 4 ans lorsque, en 1952, il devient l’héritier du trône britannique, d’emblée sevré de la présence de ses parents, appelés aux quatre coins du royaume et du Commonwealth par les innombrables devoirs de représentation d’un jeune couple souverain.

Pour se construire, il devra s’appuyer sur l’affection de sa grand-mère, Queen Mum, et de son grand-oncle, Louis Mountbatten. William, lui, est à peine plus âgé lorsque Diana, sa mère, commence à le prendre à témoin de ses chagrins conjugaux. À 7 ans, il lui glisse des mouchoirs en papier sous la porte d’une salle de bains des appartements du palais de Kensington et tente de la consoler avec ses mots d’enfant. Sa famille est en miettes, ses parents se déchirent, son frère cadet et lui vont bientôt partir en pension pour être soustraits autant que possible à cette douloureuse situation. Il est l’aîné, il se sent aussi le devoir de protéger Harry.

William et Harry entourent leur père, le 29 juin 1989, lors du spectacle du Beating Retreat, donné chaque année par les Musiques de la division de la Maison royale. © Tim Graham Photo Library/Getty ImagesWilliam et Harry entourent leur père, le 29 juin 1989, lors du spectacle du Beating Retreat, donné chaque année par les Musiques de la division de la Maison royale. © Tim Graham Photo Library/Getty Images

Son insécurité affective au fil de cette enfance volée est plus cruelle encore que celle dont souffrit si longtemps le prince Charles. Le 1er juillet 1969, l’héritier du trône ne put même pas s’entretenir avec son père, ni sa mère, au soir de son couronnement comme prince de Galles, à 21 ans, pour partager avec eux ses sentiments et son émotion. Mais s’il lui semblait souvent être considéré comme la cinquième roue du carrosse, au moins avait-il grandi dans une famille unie, fut-elle distante et régie par des usages d’un autre temps. Il fera donc de son mieux pour être proche de William et Harry et leur prouver son amour.

Entre William et Charles existent encore de sujets douloureux à évoquer 

Au début des années 1980, Charles se révèle un père moderne, qui lange ses fils bébés et s’accorde avec Diana pour leur donner l’éducation la plus normale possible, loin des rigueurs du pensionnat de Gordonstoun où lui-même a été scolarisé et dont il garde un souvenir épouvanté. Le prince de Galles se montre encore plus présent, encore plus attentif après la disparition tragique de Diana, en août 1997. Harry n’a alors que 13 ans. Plus que jamais, il faut veiller sur lui.

De dos, le prince de Galles, le prince Harry, le comte Spencer, le prince William et le prince Phillip s’apprêtent à suivre le cercueil de Diana, lors de ses funérailles, le 6 septembre 1997. © Anwar Hussein/WireImageDe dos, le prince de Galles, le prince Harry, le comte Spencer, le prince William et le prince Phillip s’apprêtent à suivre le cercueil de Diana, lors de ses funérailles, le 6 septembre 1997. © Anwar Hussein/WireImage

Charles et William, qui se retrouvent sur ce point, l’entourent de leur tendresse. L'héritier du trône aménage son emploi du temps, emmène son cadet avec lui en voyage officiel en Afrique du Sud, laisse les garçons installer une discothèque dans la cave de sa résidence de Highgrove, dans le Gloucestershire.

Quelques semaines avant l'accident de Diana, les garçons sont en vacances avec leur père, au bord de la rivière Dee, sur le domaine de Balmoral. © Tim Graham Photo Library/Getty ImagesQuelques semaines avant l'accident de Diana, les garçons sont en vacances avec leur père, au bord de la rivière Dee, sur le domaine de Balmoral. © Tim Graham Photo Library/Getty Images

L’aîné apprécie les efforts de son père, comprend qu’il a été bouleversé lui aussi par la mort de Diana, mais il garde ses distances et lui en veut du divorce – et même, parfois, de ses gestes de tendresse qui ébranlent ses préventions. Camilla demeurera longtemps le sujet impossible à évoquer. Ainsi que le rappelle Penny Junor, biographe du prince de Galles: "Diana avait confié beaucoup de sa détresse à William. Il savait que Camilla était la femme qui l’avait rendue si malheureuse. En même temps, il savait qu'elle était aussi la femme qui rendait son père heureux, et tout cela était très difficile pour lui." 

Le 11 avril 2008, le prince de Galles est fier de remettre ses ailes de pilote d’hélicoptère à William. © POOL/ Tim Graham Picture Library/Getty ImagesLe 11 avril 2008, le prince de Galles est fier de remettre ses ailes de pilote d’hélicoptère à William. © POOL/ Tim Graham Picture Library/Getty Images

Car entre William et Charles existent avant tout un amour et une admiration réciproques. La certitude aussi d’une communauté de destin. L’un et l’autre sont deux sensibilités blessées, et parfois blessées l’une par l’autre, ce qui explique la complexité de leurs relations.

Ainsi en 2017, à l’occasion du témoignage livré par William dans le cadre du documentaire Diana, notre mère : sa vie et son héritage, sur la chaîne ITV. Malgré les sollicitations des conseillers du prince Charles, William refuse catégoriquement de mentionner son père. Trop douloureux. Le prince de Galles sait que certaines plaies ne se refermeront jamais. Il en souffre, mais il est là pour ses fils, heureux de les épauler et de partager avec eux le temps qu’ils veulent bien lui donner.

William et Charles font face ensemble au Megxit

Lorsque Harry lui présente Meghan, il accueille la comédienne américaine à bras ouverts, se laisse impressionner par son caractère en "tungstène" et séduire par sa spontanéité. William en prendrait presque ombrage, d’autant que les deux frères se trouvent bientôt en froid. Charles fait alors de son mieux pour apaiser leurs relations. Avec patience, il tente de réconcilier ses fils, avant de comprendre que Harry n’écoute plus personne en dehors de son épouse. Le jeune homme s'est persuadé que son père et son frère aîné se sont ligués contre lui.

En 2014, le père et ses fils plaisantent ensemble lors du premier jour des Invictus Games de Londres. © Chris Jackson/Getty ImagesEn 2014, le père et ses fils plaisantent ensemble lors du premier jour des Invictus Games de Londres. © Chris Jackson/Getty Images

William et Charles font face, ensemble, à la tempête du Megxit. Il s’agit, pour eux, de défendre la reine et l’institution monarchique, ébranlée par le retrait de la scène publique du duc et de la duchesse de Sussex.

Et puis il y a le...

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Directrice de la rédaction

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