Harald V l’aimait comme un frère. Ce lundi 22 mars 2021, le roi de Norvège a rendu hommage à son beau-frère, Erling Lorentzen, disparu quelques jours auparavant. Soutenu par son épouse, la reine Sonja, le souverain, en béquilles – il a été opéré d’un genou en janvier –, s’est rendu à l’église d’Asker, la paroisse de la famille royale, où les obsèques ont été célébrées. Une cérémonie intime, du fait de l’épidémie de coronavirus, que les Norvégiens ont pu suivre à la télévision.
Son mariage avec la princesse Ragnhild sous haute tension
En 1940, quand l’Allemagne envahit la Norvège, Erling Lorentzen n’a que 17 ans. Le jeune homme s’engage dans la Résistance et devient officier de liaison au péril de sa vie. À la Libération, il est chargé de la sécurité de la famille royale qui rentre d’exil. Erling rencontre alors celle qui deviendra son épouse, la princesse Ragnhild, fille aînée du prince héritier Olav, âgée de tout juste 15 ans. Sans doute le plus beau parti de Norvège à l’époque. Mais dans l’Europe d’après-guerre, une princesse n’épouse pas un roturier, même un héros.
Il faudra six ans aux amoureux pour faire fléchir le prince Olav et le vieux roi Haakon VII. En 1953, le couple s’unit enfin dans cette même église d’Asker. La princesse Ragnhild ouvre la voie aux grands mariages d’amour : sa sœur cadette, la princesse Astrid, parviendra à épouser Johan Ferner, un homme divorcé... après avoir attendu treize ans ! Quant à Harald, il lui faudra batailler dix ans pour obtenir l’autorisation de son père et du gouvernement et convoler en justes noces avec Sonja Haraldsen, en 1968.
Erling Lorentzen, un homme de son temps
Au Brésil où ils décident de s’installer, Erling Lorentzen et son épouse commencent une nouvelle vie. Le couple accueille trois enfants : Haakon en 1954, Ingeborg en 1957 et Ragnhild en 1968. L’ancien garde du corps devient entrepreneur. En 1968, il fonde l’entreprise Aracruz Celulose, spécialisée dans la production de pâte à papier. Une affaire florissante qui fait sa fortune.
En 2008, quarante ans après la création de la société, l’homme d’affaires revend ses parts pour la somme astronomique de 1,7 milliard de dollars ! Dans les années 1990, conscient des défis environnementaux qui s’annoncent, notamment la déforestation qui consume le Brésil, Erling Lorentzen prône un développement économique plus respectueux de la nature.
Dans la mouvance du sommet de Rio de 1992, il impose à son entreprise une politique écoresponsable : en 1996, sous sa direction, Aracruz Celulose s’engage à planter plus d’arbres qu’elle n’en coupe et à protéger les forêts primaires. Un combat que partage, de l’autre côté de l’Atlantique, son beau-frère, Harald de Norvège, président du WWF norvégien depuis sa fondation en 1970.
Apprécié de tous au sein de la famille royale
Homme de dialogue, Erling Lorentzen vole au secours de la famille royale quand son épouse se laisse aller à des déclarations peu amènes sur Mette-Marit Tjessem Høiby, la fiancée du prince héritier Haakon. Leurs amours, étalées en place publique, ne sont pas sans lui rappeler les siennes, et les difficultés traversées cinquante ans plus tôt. "J’ai une totale confiance dans le prince héritier Haakon, c’est quelqu’un de passionnant et d’exceptionnellement bon. Et cela n’a pas été facile pour son épouse non plus. Je pense qu’aujourd’hui la plupart des gens apprécient Mette-Marit", déclare-t-il à la presse de son pays natal lors d’une de ses rares interviews.
Le prince héritier et la princesse héritière n’ont pas oublié la bienveillance de leur oncle, tout comme la princesse Märtha Louise. La princesse Astrid, veuve depuis 2015, a également tenu à faire le déplacement pour assister aux obsèques. Aux côtés de ses cousins, Haakon de Norvège porte le cercueil de son oncle jusqu’à sa dernière demeure, au côté de la princesse Ragnhild, disparue en 2012.
La famille a tenu à ce qu’il soit recouvert des drapeaux de ses deux patries, la Norvège et le Brésil, toutes deux chères à son cœur. Pour épitaphe, le beau-frère du roi s’était choisi une courte maxime : "Ne pleure pas sur le fait que je suis mort, mais réjouis-toi que j’aie vécu." L’ultime leçon d’un éternel optimiste.
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