Le temps semble s’être arrêté, à Barcelone. Aux abords de la cathédrale Sainte-Eulalie, les gens se regroupent depuis le milieu de matinée, sourire aux lèvres. Et lèvent les yeux au ciel avec reconnaissance. Pas un nuage, l’infante Cristina est chanceuse ! Il n’est pas encore midi mais déjà le soleil a envahi les rues de la capitale catalane. Autour de la Plaça Nova, on circule à peine. Chacun veut sa part de rêve et s’impatiente de voir arriver la fille du roi d’Espagne dans sa robe immaculée.

Fiancée depuis le 9 mai 1997, l’infante Cristina est l’incarnation de la femme moderne. Elle s’est installée à Barcelone à la fin de ses études en sciences politiques et mène la vie d’une Espagnole indépendante, active et entourée d’amis. Lors de sa rencontre avec le handballeur et champion olympique Iñaki Urdangarin, elle révèle toute la détermination et l’audace dont elle est capable. Cristina d’Espagne n’est pas une amoureuse timide.
Cristina et Iñaki, l'amour au premier regard
Dès le premier regard échangé avec le sportif, pendant une fête à Palma, elle sait qu’ils sont faits l’un pour l’autre. Et ne quitte pas la soirée sans avoir noté le numéro de téléphone du jeune homme. Elle lui propose par la suite une sortie au cinéma. Puis lui suggère sans détour de l’inviter au restaurant. Le sportif en est désarmé. "C’est la fille du roi !", murmure-t-il, incrédule, à l’un de ses amis comme pour se persuader qu’il ne rêve pas.

Juan Carlos Ier et Sophie d’Espagne ne sont pas convaincus par cette relation. Mais Cristina défend son choix bec et ongles. Iñaki n’a pas les quartiers de noblesse d’un Jaime de Marichalar, qui a épousé l’infante Elena en 1995, mais il est l’homme de sa vie. Les fiançailles sont une victoire d’autant plus savoureuse pour l’infante que le roi offre au couple le duché de Palma, consacrant leur idylle. Lorsqu’arrive le grand jour, Iñaki Urdangarin a tout du prince de conte de fées. En jaquette noire et cravate grise, il sourit à la foule, répond aux applaudissements d’une main tendue bien haut puis entre dans la cathédrale Sainte-Eulalie, accompagné de sa mère, Claire Liebaert.
Les Barcelonais redoublent d’enthousiasme quand s’approche enfin la Rolls Royce Phantom IV de la mariée. Le roi en descend le premier. En uniforme de capitaine général des Armées, il offre fièrement son bras à sa fille. Autour d’eux, Theodora de Grèce et Lucia Urdangarin, toutes deux demoiselles d’honneur, mettent en place la longue traîne de Cristina sur le tapis rouge.

Trois mètres vingt-cinq de dentelle brillent au soleil, reflétant de délicates broderies en fleurs de lys et flocons de neige, attributs de Sainte-Eulalie. La robe, en soie de Valence ivoire, est un modèle Empire, dessiné par le créateur Lorenzo Caprile. Le couturier l’ignore encore mais il vient de faire un pas vers la gloire, grâce à l’allure sculpturale de l’infante Cristina. La mariée a choisi pour voile une mantille en tulle et dentelle ayant appartenu à son arrière-grand-mère, Marie-Christine d’Autriche. Son diadème floral, en diamants et monté sur or blanc, provient de la cassette de la reine Sophie. Quant à ses boucles d’oreille, il s’agit de diamants ayant appartenu à sa grand-mère, la reine Victoria Eugénie.
"Votre mariage doit être un modèle pour d’autres jeunes couples"
"Guapa ! Guapa !" La foule s’enivre de ce spectacle diffusé en mondovision et scande ses ovations, rythmant la marche du roi d’Espagne et de sa fille jusqu’à l’autel. Dans la cathédrale, la chaleur est étouffante. Au sein de la chapelle de Saint Olegarius sont regroupées les choeurs Orfeo catala et Orfeón Donostiarra, qui seront accompagnés durant toute la cérémonie par l'Orchestre symphonique de Barcelone et national de la Catalogne. La partition revient pour l’heure à Mozart et sa Messe du Couronnement.
Aux rois et reines du monde entier, à tous les membres du gouvernement espagnol sans exception, à sa famille attendrie, l’infante offre un sourire radieux. Noor de Jordanie, Rainier de Monaco, Mswati III du Lesotho, Harald de Norvège, l’Aga Khan, la Grande-duchesse Maria de Russie, Farah d’Iran, Siméon de Bulgarie… les souverains des quatre coins du monde ont répondu à ce rendez-vous célébrant non seulement le bonheur de Cristina d’Espagne mais aussi la modernité de la monarchie espagnole.

"Votre mariage doit être un modèle pour d’autres jeunes couples. Que votre amour soit visible aux yeux de Dieu. Soyez désormais une seule chair." Tandis que, dans l’assemblée, hommes et femmes agitent leurs livrets de messe comme des éventails, Monseigneur Ricard Maria Carles Gordo, archevêque de Barcelone, poursuit son homélie. "Votre authenticité, Cristina, a bien vite suscité la sympathie de tous les Catalans. Quant à vous Iñaki, on estime autant l’homme que le grand sportif de renom. Ne perdez jamais ces vertus et cette humanité." Avant l’échange des voeux, Cristina esquisse une révérence et attend du regard le consentement de son père, le roi. Le visage de Juan Carlos ne ment pas. Le souverain est ému aux larmes. Iñaki peut enfin passer l’anneau nuptial au doigt de l’infante. À la main droite comme le veut la tradition catalane. Puis il lui fait l’offrande de treize pièces d’or, présage d’une longue vie commune.
Après un chaste baiser, les mariés signent le registre. Suivis de leurs témoins. Pour l’infante Cristina, il s’agit du prince Felipe, de l’infante Elena et de son époux Jaime de Marichalar, d’Alexia de Grèce et de Cristina de Bourbon-Siciles, de Kubrat de Bulgarie ainsi que de l’une de ses amies proches, Victoria Fumado. Les témoins d’Iñaki Urdangarin sont son frère Miguel, ses soeurs Ana et Lucia puis l’un de ses coéquipiers du Barça Fernando Babeito.
Un amour triomphant et une forme d'insouciance
Quand s’élèvent les premières notes de l’Hallelujah de Haendel, le duc et la duchesse de Palma sont aux anges. Au bras d’Iñaki, Cristina d’Espagne se dirige vers la sortie de la cathédrale. Les rues n’ont pas désempli. La Rolls Royce royale se dirige à présent vers la basilique Notre-Dame-de-la-Merci. Là, l’infante déposera son bouquet de lys et d’iris hispanica sur l’autel de la Sainte patronne de Barcelone. Tout au long du trajet, des centaines de milliers de Catalans en délire applaudissent à tout va et lancent des oeillets blancs aux mariés. "Cela faisait deux siècles que nous attendions une union royale, s’émeut l’historien Lluis Permanyer. La dernière, entre le futur Ferdinand VII d’Espagne et Maria Antonia de Bourbon-Parme, date de 1802."

C’est au Palais Pedralbes que se poursuivent les festivités. Partout, des massifs et des cascades de fleurs roses et blanches. Le banquet se tient sur deux étages de la demeure. Avec la complicité de la reine Sophie, Cristina a fait concocter plusieurs menus, dont l’un d’inspiration macrobiotique, par le traiteur Semon. Soufflé de cigales de mer, perdrix à la catalane, surprise de quinoa royal...
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