Exclusif. Joachim et Marie de Danemark nous reçoivent à Paris, en toute franchise

Durant l’été 2020, le fils cadet de la reine Margrethe de Danemark était victime d’un AVC, aussitôt pris en charge avec succès par l’équipe médicale de l’hôpital de Toulouse. Neuf mois plus tard, il nous reçoit à Paris, où il est installé en famille depuis sa nomination comme attaché de défense à l’ambassade du Danemark. Avec son épouse la princesse Marie, ils évoquent la vie d’après, leurs enfants, leur rôle en tant que membres d’une famille régnante, l’amour du Danemark et ces racines françaises primordiales dans leur équilibre. Avec franchise et philosophie.

Par Marie-Eudes Lauriot Prévost - 12 mai 2021, 07h30

 À l’image de leur couple aux racines franco-danoises, Marie et Joachim ont imaginé une décoration métissée pour leur appartement haussmannien.
À l’image de leur couple aux racines franco-danoises, Marie et Joachim ont imaginé une décoration métissée pour leur appartement haussmannien. © David Atlan

Comment allez-vous Monseigneur ?

S.A.R. le prince Joachim : Merci. Je vais bien, je suis en bonne santé. Grâce au grand professionnalisme des médecins qui m’ont soigné, et avant tout grâce à ma femme qui, par sa réaction immédiate, a compris qu’il fallait agir très vite.

S. A. R. la princesse Marie : Nous étions chez des cousins de mon mari, à côté du château de Cayx, pour un dîner de famille. Comme d’habitude, nous nous retrouvons sur la terrasse pour nous saluer et boire l’apéritif. Quand j’entends d’une oreille que mon mari, qui s’exprime d’habitude de façon très élaborée, parle d’une façon bizarre. Je lui fais répéter et c’est toujours aussi confus. Il avait une paralysie faciale mais ne s’en rendait pas compte. Tout le côté gauche commençait à être atteint. Il a fallu aller très vite. Les médecins m’ont préparée au pire. Puis le miracle s’est produit.

Prince Joachim : Je n’ai eu aucun signe avant-coureur, ni malaise ni douleur. Je ne comprenais pas la réaction de mon épouse. Grâce à l’extraordinaire service neurochirurgical de Toulouse, j’ai été opéré tout de suite. J’ai été dans les meilleures mains, il n’y a pas de doute.

Joachim et Marie de Danemark dans la cour de leur immeuble parisien. © David Atlan
Joachim et Marie de Danemark dans la cour de leur immeuble parisien. © David Atlan

À vous voir aujourd’hui si en forme, vous semblez avoir récupéré assez vite ?

Oui. J’ai cherché à savoir quelles pouvaient être les suites d’un tel accident et je me rends compte qu’il est vraiment rare de n’avoir aucune séquelle.

Avez-vous changé quelque chose dans votre mode de vie ?

Pas vraiment, car cet accident n’était pas lié à une mauvaise hygiène de vie mais à un simple accident, une dissection d’une artère du cou probablement liée à un faux mouvement ou un coup de tête trop violent en jouant au foot avec mes aînés. Je ne me souviens absolument pas d’avoir ressenti une douleur. Le sang coagulé s’est décroché et a formé un bouchon dans une artère vers le cerveau. Un peu comme le coup du lapin.

Princesse Marie : Tu n’as plus 20 ans mon chéri ! Heureusement, ce n’est pas une maladie chronique.

Et vous, Madame, comment allez-vous ?

Paradoxalement, je pense que j’ai été beaucoup plus affectée que mon mari. Cet accident m’a fait changer ma façon de voir le futur. Nous sommes beaucoup plus forts aujourd’hui et sûrs de ce que nous voulons construire ensemble. Plus aucun doute : nous devons apprécier chaque jour vécu et surtout ne plus perdre de temps à des choses futiles et inutiles. La vie est fragile, seules comptent la famille et une bonne santé. Je le savais, mais quand cela vous frôle ainsi, on en acquiert vraiment la certitude. Seul problème : je suis toujours un peu inquiète maintenant. Je m’étais toujours dit : Joachim est mon Viking, jamais malade, pas même une grippe. Pour moi, c’était une valeur sûre ! Mais la preuve qu’il est bel et bien un Viking, c’est qu’il s’est remis vite et bien.

Vous voilà à Paris pour trois ans au moins. Comment êtes-vous installés ?

Prince Joachim : Nous vivons près du parc Monceau dans un appartement que nous louons. Au début, il était prévu que nous y restions un an, le temps de mon année de formation au Centre des hautes études militaires. J’ai été invité à suivre cet enseignement par l’État français. C’était un grand honneur, d’autant que j’étais le premier Danois. Chaque promotion compte vingt-cinq officiers français appelés à endosser des responsabilités de la plus haute gestion militaire et cinq étrangers invités afin de maintenir des relations cordiales entre la France et les pays amis. Ce fut un début d’année très intense, des cours six jours sur sept, beaucoup de voyages, ce qui fait que je n’ai pas beaucoup vu ma famille. Puis la Covid a bouleversé les choses et je me suis mis au télétravail. Je peux dire que cette passionnante année d’études a été pour moi une révélation. Découvrir une telle intensité de contenu, une telle vision…

Partie de Uno dans la cour. Les règles sont claires: c’est à qui sera le plus impitoyable ! © David Atlan
Partie de Uno dans la cour. Les règles sont claires: c’est à qui sera le plus impitoyable ! © David Atlan

D’où votre volonté de poursuivre dans cette voie…

Le ministère de la Défense au Danemark m’a ensuite proposé pour trois ans le poste d’attaché de défense à l’ambassade du Danemark à Paris. Cela semblait une suite naturelle.

Princesse Marie : Finalement, c’est très bien tombé. Après l’accident, cet environnement plus calme te convient bien. Pour les enfants, c’est aussi une bonne chose. Ils commençaient à bien parler français et à faire connaissance avec la culture française et tout s’est arrêté avec le confinement. Rien n’était prévu au départ.

Appréciez-vous la vie parisienne ?

Difficile à dire avec cette pandémie ! Paris sans pouvoir sortir, ce n’est pas Paris ! Nous sommes tous dans la même situation, avec le mot télétravail à la bouche. Et très peu de contacts, ce qui est terrible pour moi, car c’est ce qui constitue l’essence de mon travail. On s’adapte. En mars 2020, juste avant le confinement, je suis rentrée d’Ouganda où j’étais allée pour DanChurchAid, une organisation humanitaire que j’aime beaucoup, dépendant de l’église danoise. Ces dernières années, dans le cadre de la lutte contre le gaspillage alimentaire, nous avons ouvert au Danemark des supermarchés Wefood, qui écoulent des denrées à moitié prix. J’ai pu faire quelques voyages au Danemark en septembre dernier, mais c’est très limité. Je suis constamment en lien avec Copenhague depuis mon bureau installé dans la salle à manger, ou très souvent depuis la cuisine, plus agréable et lumineuse pour les réunions Zoom.

Prince Joachim : Cette situation ne nous déplaît pas, même si la Ville lumière sous couvre-feu a quelque chose de triste. Bien sûr, il nous arrivait de sortir le soir, ce qui n’est plus le cas en ce moment. Mais nous avions décidé depuis un moment de nous occuper de nos enfants à plein temps : le travail scolaire, les repas, les jeux… Aujourd’hui, nous sommes tout le temps ensemble et c’est formidable parce que Henrik et Athena sont adorables. Nous formons une bonne équipe, nous parlons de tout, ils ont beaucoup d’humour. Quand les grands viennent [le prince Nikolai et le prince Felix, nés du premier mariage du prince Joachim, ndlr], les petits sont tellement contents !

Comment le prince Henrik et la princesse Athena se sont-ils adaptés au système scolaire français ?

Princesse Marie : Ici, le système est très académique. On apprend beaucoup et vite. Ils suivent mais ne sortent pas de leurs livres. Au Danemark, le développement psychique de l’enfant est davantage pris en compte, on l’incite davantage à s’exprimer.

Henrik et Athena jouent dans les fauteuils Egg du designer danois Arne Jacobsen. © David Atlan
Henrik et Athena jouent dans les fauteuils Egg du designer danois Arne Jacobsen. © David Atlan

Prince Joachim : Au Danemark, tout tourne autour du bien-être de l’enfant, ce qui fait que, parfois, le niveau académique n’est pas aussi élevé qu’en France. Henrik et Athena connaissent énormément de choses aujourd’hui, d’autant qu’ils sont dans une école bilingue. En un an, ils ont appris le français, l’anglais, la grammaire, la physique… Au début, ils ne comprenaient pas trop le système des contrôles, puisqu’au Danemark, on ne donne pas de notes aux petits. Le système de notes vient bien plus tard. Mais ils ont l’air contents. En tout cas, ils se débrouillent très bien.

À l’école, leurs camarades savent-ils qu’ils appartiennent à une famille royale ?

Princesse Marie : Forcément, cela finit par...

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Directrice de la rédaction

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