Il était l’héritier d’une histoire fascinante, née de la nuit des temps, tissée d’épopées et de glamour. C’est à Médine, au VIIe siècle, que cette histoire voit le jour, lorsque Fatima, fille du prophète Mahomet, épouse son cousin, Ali. Génération après génération, les descendants du couple seront considérés par les Chiites comme leurs imams. À la fin du VIIIe siècle, plusieurs schismes verront naître la communauté des Ismaéliens – qui continueront de prier les descendants d’Ali – et causeront son exode à travers la Perse, l’Égypte et l’Inde. Au XIXe siècle, lorsque le 46e imam Hasan Ali Shah épouse la fille de l’empereur perse Fath Ali Chah Qadjar, la lignée se voit dotée du titre nobiliaire "Aga Khan" (Seigneur et roi).
Né à Genève, le 13 décembre 1936, Karim Al Hussaini est le fils du prince Ali Khan et de Joan Yarde-Butler, issue de l’aristocratie britannique. Son grand-père, l’Aga Khan III, espère un temps que cette union détournera son fils des casinos comme des clubs. La naissance du prince Amyn, un an après le mariage, n’empêche pas le couple de s’éloigner puis de divorcer, en 1949. Le prince Ali Khan renoue avec sa vie de jet-setteur et fait très vite la une de la presse en compagnie de l’actrice Rita Hayworth. Ses deuxièmes noces, le 27 mai 1949, avec l’interprète de Gilda, finissent de convaincre l’Aga Khan III. Son petit-fils, Karim, sera son successeur comme chef spirituel des Ismaéliens.

Le 11 juillet 1957, alors qu’il n’est encore qu’un étudiant à Harvard, le destin du jeune Karim bascule. Son grand-père vient de mourir et ses dispositions testamentaires sont claires : "Vu les bouleversements qui se sont produits dans le monde au cours des récentes années de par le fait d’une rapide évolution, en particulier dans le domaine de la science atomique, je suis convaincu que dans l’intérêt même de la communauté chiite musulmane ismaélienne, il convient que me succède un homme jeune, qui a acquis éducation et instruction au cours de ces dernières années dans l’esprit même de cette ère nouvelle qui remplira dans un esprit nouveau ses devoirs d’imam. Pour ces raisons, et bien qu’il ne figure pas parmi mes héritiers, je désigne mon petit-fils Karim, fils de mon fils Ali Salman Khan, comme successeur au titre d’Aga Khan et à la charge d’Imam de tous mes fidèles chiites ismaéliens".
Dès 1967, après avoir mené d’importantes opérations immobilières, l’Aga Khan IV crée une première fondation destinée à soutenir les pays en voie de développement à travers des actions culturelles et sociales. Avec le temps, la structure évolue et devient l’Aga Khan Development Network, un réseau présent dans trente pays et employant près de 100 000 personnes.

Comme son père, et son grand-père – qui avait épousé en troisième noces une ancienne Miss France –, le prince Karim Aga Khan est sensible au charme féminin. Le 28 octobre 1969, il épouse Sarah Croker-Poole, qui devient la bégum Salimah. Avant de divorcer, en 1995, ils ont trois enfants : Zahra en 1970, Rahim en 1971 et Hussain en 1974. De sa seconde épouse, Gabriele Thyssen, devenue la bégum Inaara, l’Aga Khan a un troisième fils, Ali, né en juin 2000. Le mariage ne dure que cinq ans et le divorce à l’issue duquel l’Aga Khan doit verser près de soixante millions d’euros à son ex-femme défraie la chronique.
Outre ses actions philanthropiques, qui l’ont conduit à mettre en place le Forum de Paris pour la paix ou encore à créer la Fondation pour la sauvegarde et le développement du domaine de Chantilly, le chef des Ismaéliens était un passionné d’équitation. À la tête de haras en France et en Irlande, il a vu plusieurs de ses pur-sang remporter de prestigieux derbys.
À travers le monde, les Ismaéliens pleurent leur imam et attendent l’annonce de sa succession.
