Tous les quatre ans, la fièvre olympique saisit la planète. Il en est ainsi depuis que le baron Pierre de Coubertin a lancé les Jeux de l’ère moderne en 1894. D’abord confidentielle, cette compétition internationale fait aujourd’hui figure de rouleau compresseur à exploits sportifs, de cash machine pour sponsors gourmands, mais aussi de théâtre idéal pour des actes parfois dramatiques sinon plus souvent touchants, inspirants. Voire romantiques. Comme en témoigne cette histoire d’amour qui s’est dessinée il y a plus de cinquante ans au cœur de la verdoyante Bavière.
À Munich, d'un salon VIP à une soirée endiablée
En ce samedi 26 août 1972, le monde s’est donc donné rendez-vous au stade olympique de Munich pour l’ouverture des XXe Jeux placée sous le signe de la légèreté. Contrastant ainsi avec l’image sombre des JO de Berlin de 1936. Le soleil est de la partie, la température clémente. À peine 21 degrés. Dans les tribunes, athlètes prêts à en découdre, anonymes en effervescence et officiels de tout bord s’affairent à prendre place.
hKTW8dx9eS.jpg)
Notamment au salon des personnalités où la jeune Silvia Sommerlath, attachée au consulat d’Argentine, joue les hôtesses en chef. "Le lieu était rempli de têtes couronnées, chefs d’État, diplomates, et d’un important service de sécurité. Soudain, j’ai senti le regard de quelqu’un sur moi. Je me suis retournée. Un homme m’observait avec ses jumelles… à un mètre seulement de moi ! C’était insolite." L’homme en question – dont elle ignore alors tout – est prince héritier. Pas encore roi de Suède.


Carl Gustaf, 26 ans, trimballe surtout une solide réputation de play-boy. À la technique d’approche, somme toute, assez discutable. Qu’importe. "Notre vie commune a ainsi commencé dans un éclat de rire, se remémorera la future souveraine. Et depuis, cela n’a jamais cessé." Oubliant ce charmant intermède, la Germano-brésilienne de 29 ans poursuit consciencieusement sa tâche d’accueil. Puis assiste, comme les 7.0000 spectateurs présents, au début de ces nouveaux Jeux.
Lire aussi >> Les festivités du jubilé d’or de Carl XVI Gustaf de Suède sont lancées !
L’événement se termine ce jour-là par un cocktail réservé aux officiels. Fidèle à son rôle, Silvia est présente pour répondre aux attentes des convives. Parmi lesquels se trouve Carl Gustaf. Résolument sous le charme de cette piquante liane brune, il envoie son aide de camp sonder la jeune femme. Le suivrait-elle pour être présentée à Son Altesse Royale ?
Flattée, elle accepte et découvre que le prince qu’on veut lui présenter n’est autre que l’homme aux jumelles ! Après avoir discuté un moment, Carl Gustaf l’invite à dîner le soir même. Mais le tête-à-tête espéré tient tout en réalité de la réunion familiale… L’oncle du jeune homme, le prince Bertil (accompagné de son épouse Lilian) est là, tout comme l’une de ses sœurs, la princesse Birgitta, et son mari le prince Johann Georg de Hohenzollern-Sigmaringen.
KFMmtVR8It.jpg)
Celle-ci révélera d’ailleurs un jour dans la presse suédoise les dessous de ce moment privilégié : "Silvia s’est retrouvée au milieu du dîner privé de la famille royale. Elle était en retard et une fois entrée dans le restaurant, elle a été bien accueillie par nous tous. En toute simplicité. Nous étions contents de faire sa connaissance. Ce fut une soirée inoubliable. Voire assez surréaliste, en y repensant ! Car notre oncle Bertil a tout à coup eu envie de jouer à la corrida. Silvia portait une longue cape noire par-dessus sa robe olympique. Elle devait la tenir à la manière d’un torero. Nous, nous étions les taureaux prêts à lui foncer dessus. Pauvre Silvia, elle a dû penser que nous étions fous !" À l’issue de ce repas festif, Carl Gustaf emmène sa future promise danser jusqu’au bout de la nuit au Kinki, un bar discothèque branché de la capitale bavaroise.

La magie opère. Les voilà désormais inséparables. Quelques jours plus tard, le prince héritier regagne cependant son royaume. Une photo de Silvia en poche (qu’il déposera ensuite sur sa table de chevet) et la promesse de se revoir très vite. Clandestinement d’abord. Toujours entre l’Allemagne et la Suède.
yez1Wb8cEI.jpg)
Mais l’été suivant, un paparazzi les photographie en train de faire le plein de la Porsche bleue princière dans une station Shell. La liaison est aussitôt officialisée. Progressivement, Silvia apprend les rudiments de la cour et s’impose dans le cœur de toute une nation qui, le 12 mars 1976, ne peut que se réjouir de ses fiançailles avec leur jeune souverain.
Une délégation danoise aux antipodes
Un peu moins de trente ans plus tard, Mary Donaldson, Tasmanienne de 28 ans, va, elle aussi, connaître un changement radical de vie grâce aux Jeux olympiques. Le nouveau millénaire vient de s’ouvrir et cette jeune femme qui évolue dans le milieu de la communication et de la publicité désespère de trouver l’âme sœur. En plein été, ses pas la mènent sur le marché du quartier de Paddington, à Sydney.
JKt9pxqVY0.jpg)
Elle y croise une voyante qui lui fait d’étonnantes révélations. "Elle m’a dit que j’allais rencontrer quelqu’un de très mondain venu de l’étranger. Grâce à lui, j’allais devenir célèbre et je m’installerais en Europe." Mary fait mine d’y croire, remercie poliment, paie son dû et retourne vaquer à son quotidien. Quelques jours plus tard, les JO s’ouvrent en Australie. À chaque coin de rue, tout n’est que joie, fête, brassage, partage, découverte d’autres cultures. Mary, comme tant d’autres, se laisse emporter par cette incroyable vague. De même que Frederik de Danemark. À 32 ans, l’héritier du trône, flanqué de son frère cadet Joachim, est venu soutenir la délégation danoise.
Lire aussi >> Frederik X et Mary de Danemark fêtent leurs vingt ans de mariage : le triomphe de leur amour
Le 16 septembre, après avoir encouragé toute la journée leurs compatriotes engagés dans plusieurs épreuves, les frères retrouvent leur cousine la princesse Marthä Louise de Norvège, le prince Nikólaos de Grèce et l’un des neveux du roi Juan Carlos d’Espagne, Bruno Gómez-Acebo. Lequel a demandé à une amie australienne de leur faire découvrir les bonnes adresses de Sydney by night. Après avoir écumé quelques pubs, la joyeuse troupe princière trouve refuge dans un bar, le Slip Inn, où ils rejoignent d’autres jeunes gens. Des amis d’amis.

Parmi eux, Mary. En top moulant beige, jean et queue-de-cheval impeccable, elle accompagne son colocataire Andrew et son amie Beatrice. Les présentations sont vite faites. "On s’est serré la main. J’ignorais qu’il était prince du Danemark", confiera-t-elle bien des années plus tard, au moment de ses fiançailles. D’ailleurs, du Danemark, la jeune femme ne connaît que l’histoire des Vikings.
Elle a entendu parler de Hans Christian Andersen et sait que l’Opéra de Sydney a été dessiné par un Danois. Quant à citer le nom du roi ou de la reine, voire du prince héritier, impossible. À table, Frederik se retrouve assis à côté d’elle. Mais c’est la serveuse qu’il préfère entreprendre en premier en lui racontant qu’il est l’un des triathlètes de l’équipe danoise… On rit. L’ambiance est détendue. Mary racontera : "Au cours de la soirée quelqu’un m’a dit : 'Sais-tu qui sont tous ces gens ?' J’ai répondu que non." Pour elle, il est juste Fred. La conversation dévie sur un terrain plus cocasse. On cherche à savoir si un homme est plus attirant avec un torse velu.

Trois mâles, dont Frederik, soulèvent leur tee-shirt pour approbation. De quoi amuser l’Australienne peu à peu séduite, qui se découvre de nombreux points communs avec ce beau brun. À la fin de la soirée, Mary lui donne son numéro de téléphone. "Il m’a appelé dès le lendemain. Manifestement, quelque chose s’était passé entre nous. Dès le premier moment où nous avons commencé à parler, nous n’avons jamais vraiment arrêté. Je ne dirais pas que c’était un feu d’artifice de sentiments, mais il y avait beaucoup d’excitation à nous revoir." Ce que confirmera un jour le prince héritier. "C’était du pur plaisir d’échanger avec elle. Il y avait une sorte de connexion entre nous. Lentement mais sûrement, nous avons bâti cet amour."
yjfAtqVNQ1.jpg)
Pendant plus d’un an, Frederik multiplie les allers-retours Copenhague-Sydney. Officiellement pour découvrir davantage ce pays. Officieusement pour retrouver sa belle Mary. Jusqu’à ce qu’en novembre 2001, un tabloïd, ne révèle – enfin – le visage de la mystérieuse petite amie cachée de Frederik. Et précipite sa venue dans ce royaume du Nord si loin de sa terre australe…
Une sirène en hiver
Pour Albert de Monaco et son épouse Charlène, les JO n’ont en revanche pas été l’antre de leur rencontre, mais celui de l’officialisation d’un amour déjà solide. Lorsqu’un soir de février 2006, dans les gradins du stade olympique turinois, ils laissent éclater leurs sentiments à la face du monde, cela fait déjà six ans que tous deux se connaissent. Leur coup de foudre a en effet eu lieu en l’an 2000 lors du meeting international de natation de Monaco. Cette compétition qui réunit l’élite internationale de la discipline fait partie du circuit Mare Nostrum depuis 1983.
OCeUKoxeN0.jpg)
La championne sud-africaine y est alors venue glaner quelques médailles, mais a surtout gagné le cœur de l’héritier monégasque, parrain de la manifestation. Pendant quelque temps, le prince et la longiligne sirène s’apprivoisent discrètement, s’éloignent pour mieux se retrouver à nouveau. En cet hiver 2006, tandis que s’ouvre une nouvelle édition des JO, le feu de leur passion s’est ravivé depuis peu et Albert, monté sur le trône de la Principauté quelques mois auparavant, oublie son habituelle réserve. Il ne craint désormais plus de tout dévoiler au grand jour.
ioeSDCcJgS.jpg)
Pour ces deux amateurs de sport, quel meilleur endroit qu’une arène sportive olympique – Albert a d’ailleurs participé aux Jeux au sein de l’équipe monégasque de bobsleigh entre 1988 et 2002, et Charlène à ceux de Sydney en 2000 – pour officialiser cette évidence ? Perdu au milieu d’une foule de 35.000 personnes, le souverain, par ailleurs membre du Comité international olympique, se veut bien sûr attentif au show qui se déroule sous ses yeux, mais surtout aux desiderata de la liane blonde au chignon serré blottie tout contre lui.
0n0iRLsgr1.jpg)
Dans leur bulle, comme n’importe quels amoureux du monde, ils rient, s’offrent quelques facéties avec une lampe torche, échangent des regards qui en disent long, encouragent à cor et à cri les quatre athlètes qui composent la délégation monégasque à leur passage. Charlène, qui a adopté les couleurs de la Principauté dont elle porte l’écusson bien en évidence autour du cou, ose même s’abandonner tendrement sur l’épaule de son compagnon. Un geste affectueux qui vaut bien tous les communiqués officiels…
