Elle semble avoir toujours été là. Derrière de hautes haies, ses lignes traditionnelles et son toit de chaume inspirent la quiétude. Comme souvent en Belgique, l’accueil est simple, chaleureux. Dès l’entrée, d’une voix grave et d’un regard bleu acier où pointe l’humour, Edouard Vermeulen met ses visiteurs à l’aise et leur offre, sans façon, l’hospitalité. La villa qu’il vient de terminer sur la côte flamande est un havre de paix où le couturier vient se ressourcer au grand air de la mer du Nord. "Je rêvais, confie-t-il, d’une maison de vacances relax où la famille et les amis peuvent arriver à l’improviste et rester tant qu’ils le veulent."
"Je voulais que la maison rassemble une famille de designers"
Diplômé en architecture d’intérieur, Edouard aurait pu être décorateur. Le hasard fait qu’il se tourne vers la mode et devient styliste. Surnommé le "couturier des reines", Edouard Vermeulen, élevé au rang de baron par Philippe de Belgique en 2017, vient à Knokke-le-Zoute depuis sa plus tendre enfance. "Ma grand-mère y venait déjà. J’y ai mes habitudes et j’adore la mer ! Je me baigne très tôt, quand la plage est encore déserte", raconte-t-il. Un temps, Edouard s’est installé à l’étage de sa maison-boutique au cœur de la station balnéaire, puis il a souhaité avoir sa propre demeure pour mieux recevoir.
"Il y a trois ans, en sortant du golf, je vois un panneau 'terrain à vendre'. J’ai compris tout de suite que c’était là." Le couturier sait déjà ce qu’il ne veut pas : ni un cube de verre design, ni une villa ostentatoire. "Je rêvais d’une maison classique, comme celles construites ici par l’architecte Joseph Viérin au début du XXe siècle." Edouard prépare alors son canevas et pense à l’architecte Stéphane Boens. "Un ami de jeunesse. Je lui ai proposé de concrétiser mes idées et il a accepté ! De plus, Stéphane maîtrise à la perfection ce type d’architecture traditionnelle. Il connaît les meilleurs artisans capables de construire dans ce style si particulier à la région avec des matériaux nobles."
L’architecte n’est pas le seul maître d’œuvre auquel le couturier fait appel pour son projet : sa nouvelle propriété est une œuvre collective de talents, avec Edouard comme chef d’orchestre. "Je voulais que la maison rassemble une famille de designers, chacun interprétant sa vision. Tout comme les maisons familiales évoquent les passages de plusieurs générations." Pour la décoration intérieure, Nathalie Deboel, dont l’agence est basée à Knokke-le-Zoute, signe une ambiance dépouillée, mais chaleureuse, qui évolue au gré des saisons.
L'oeil artistique d'Edouard Vermeulen
Ainsi, au rez-de-chaussée, les pièces se suivent dans une perspective assumée, les collections de meubles et d’objets d’art ne sont pas disposées de manière conventionnelle, à l’instar de cette sculpture monumentale sise au milieu de la bibliothèque. Située entre le salon et la cuisine, cette pièce sert surtout de passage. "Il faut toujours une antichambre 'inutile' qui prolonge la perspective et invite à découvrir un autre espace", précise Edouard. À l’étage, auquel on accède depuis le hall central par un magnifique escalier hélicoïdal, les chambres cosy et mansardées, telles des suites d’hôtel, invitent à la détente.
Jean-Philippe Demeyer, décorateur flamand de renom, a participé au choix des textiles. Ici aussi, Edouard se donne la liberté de tout assembler, des teintes unies et subtiles, comme les rideaux couleur écume de la salle à manger en soie sauvage de Jim Thompson ou des coussins frangés dans la cuisine, et ose un pouf imprimé de Pierre Frey au centre du salon. Une association raffinée qui confère une ambiance pleine de couleurs tout en restant zen. "Je ne veux pas figer les choses. Tout peut encore changer !", confie Edouard en souriant. "Les chambres, où l’on se repose, doivent être sanctuarisées, mais pour les pièces de vie, les espaces n’ont pas de fonction fixe. J’aime le côté nomade : les meubles et les objets d’art peuvent circuler en fonction du moment ou de l’occasion."
Edouard Vermeulen imprime, quant à lui, son œil artistique avec de nouvelles œuvres d’art et des objets pensés pour le lieu. Les sculptures de Sterling Ruby et de Florian Tomballe, des tableaux de Michel Mouffe et de Ron Gorchov, des meubles de Jorge Zalszupin ou de la vaisselle en céramique d’Ottolenghi composent une collection éclectique qui s’harmonise sans toutefois se ressembler. Un peu comme dans une garde-robe où le vestiaire composé de toilettes disparates finit par définir un style personnel. Le parallèle est permis, nous sommes chez un couturier après tout, qui plus est "fournisseur breveté de la cour de Belgique" depuis vingt ans !
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