Une fois par an, au mois d’avril, une trentaine de dhows, les traditionnels bateaux de pêcheurs des pays du Golfe, se donnent rendez-vous au large de Doha pour célébrer le festival de Senyar. Sur chacun d’entre eux a embarqué une équipe de plongeurs amateurs. Tous connaissent les récifs sur lesquels sont accrochés les bancs d’huîtres perlières. Et, durant deux jours, ils plongent à plusieurs mètres de profondeur à la recherche de la mythique Pinctada. Une fois sur 10.000, cette huître abrite une perle. Un simple grain de sable qui irrite la chair du mollusque. Pour se défendre, année après année, ce dernier recouvre le grain de nacre. Ainsi naissent les perles naturelles. Au terme des deux journées en mer, la flottille rentre à Doha et le dhow qui a fait la plus belle pêche remporte la victoire. Les huîtres sont alors soigneusement rendues à la mer.
"Le résultat d’une relation de confiance tissée depuis plusieurs années"
Bien avant la découverte du pétrole, la pêche perlière, pratiquée depuis 4.000 années, représentait 70 % des exportations des pays du Golfe. Aujourd’hui, elle est devenue un hobby. "Les perles sont encore là, précise Aisha Al Fardan, mais l’activité n’est plus économiquement rentable. Elle est simplement pratiquée par des amateurs qui perpétuent la tradition de nos ancêtres." Depuis presque 150 ans, la famille Al Fardan est associée à la perle fine. Le patriarche, Hussain Al Fardan, fait volontiers visiter sa collection personnelle.
Dire qu’il en possède des milliers est bien en dessous de la vérité. Son bureau est une table vitrée à trois compartiments dans lesquels sont présentées des dizaines de milliers de perles de toutes les tailles et de tous les coloris. Contre les murs de la pièce sont disposées des vitrines de bijoux. Et bien sûr les perles y sont omniprésentes. Elles sont montées en broches, pendants d’oreilles, bagues, colliers et même diadèmes. "Mon père a créé tous les diadèmes de mariage de ses petites-filles", confie Aisha Al Fardan.

L’événement joaillier de ce début d’année 2023 est l’arrivée d’une partie du trésor de la famille Al Fardan chez Tiffany. Le joaillier propose une collection capsule de 21 bijoux entièrement consacrée à la perle fine. "Cette collaboration avec la famille Al Fardan est le résultat d’une relation de confiance tissée depuis plusieurs années, explique Anthony Ledru, le président de Tiffany. C’est un honneur extraordinaire. Monsieur Al Fardan a accepté de nous confier une partie de ses perles et je crois qu’il est content de la manière dont nous les avons utilisées."

Ici, pas question de carats, de pureté, de taille. Tous les termes utilisés pour les pierres taillées disparaissent au profit du langage des perles. Le poids est important bien sûr, mais la «peau» de la perle, sa couleur, sa rondeur, sa régularité et surtout son éclat – ce que l’on appelle l’Orient – sont les valeurs clefs. Dans les ateliers de Tiffany plusieurs de ces perles ont fait la rencontre d’un autre symbole de la joaillerie, le célèbre "Bird on a Rock". Cet oiseau de diamants, un peu ébouriffé avec son aigrette d’or, a été imaginé par Jean Schlumberger dans les années 1960. Sa première incarnation était destinée à la nouvelle monture du célèbre diamant Tiffany (128,54 carats) qui appartient à la maison depuis 1877. Par la suite, il a été décliné sur des bagues, des broches, toujours dans la même position, dressé sur la pierre.
Un second trésor pour l'année 2023
Pour la première fois dans son histoire, le "phénix" de Tiffany est associé à des perles. Sept d’entre elles, dont les poids varient entre 35 et 12 carats, sont montées en broche. Chacun des sept volatiles de diamants a été conçu avec des proportions différentes, en fonction du poids de la perle sur laquelle il est posé, dressé sur ses pattes. Autre variante, particulièrement réussie, une poire de 30 carats, légèrement baroque, s’abrite sous les plumes enroulées de la queue de l’oiseau. Le dessin est similaire pour deux autres poires, l’une blanche et l’autre noire, qui forment une paire de pendants d’oreilles exceptionnels. Le bijou le plus important de la collection est un collier de trois rangs de perles fines. Les créateurs de Tiffany ont disposé un envol d’oiseaux de diamants sur sa partie centrale.

Clin d’œil du destin, cette collection célébrant la perle fine est aussi une référence à l’histoire de la maison. En 1887, Charles Tiffany était venu en personne à Paris pour enchérir lors de la célèbre vente des diamants de la Couronne de France. Non seulement il avait acquis une grande partie des pierres accumulée par les rois et les empereurs des Français, mais il avait aussi emporté un ensemble de perles exceptionnel. Pour 180 000 francs or de l’époque, il était devenu le propriétaire de quatre des huit rangs de perles du collier mythique créé pour l’impératrice Eugénie.

La collection "Bird on a Pearl" 2023 comporte cinq rangs de perles fines vendus séparément. Le diamètre des perles centrales de chacun de ces colliers varie entre 8,5 et 12 millimètres. Autour d’elles, la chute de perles s’arrondit jusqu’au fermoir composé de trois brillants de la plus belle qualité. Le savoir-faire de la famille Al Fardan a permis la création de ces cinq rangs aux dégradés exceptionnels par la régularité de leurs couleurs et de leurs diamètres. "La relation avec la famille Al Fardan va se poursuivre sur le long terme, ajoute Anthony Ledru. Ces 21 bijoux sont en fait la première partie d’une collection consacrée à la perle fine dont nous présenterons les créations pendant plusieurs années."

Et comme si cela ne suffisait pas, Tiffany propose un second trésor en ouverture de cette année 2023. Trente-cinq diamants à vous couper le souffle, dont les couleurs explorent une palette subtile entre le rose, le rouge et le pourpre. Tous proviennent de la même mine australienne, celle d’Argyle. Ce gisement, dont l’activité a débuté en 1983, a fermé au mois de novembre 2020. Pendant ces trente-sept années, Argyle a été la seule mine connue de diamants roses. Un miracle de la planète qui a débuté il y a un milliard et demi d’années. Ces trente-cinq diamants, dont seulement trois affichent un poids supérieur à 1 carat, sont le dernier lot rarissime provenant de cette mine. Aucune décision n’a encore été prise sur la manière dont ces diamants seront montés.

Pour l’instant, Tiffany se contente de les exposer à New...
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