Seule une photo dans les archives de la maison Boucheron conservait la mémoire de ce diadème que l’on n’avait pas revu depuis la fin des années 1930. Et pourtant, c’est ce bijou qui a été choisi par la princesse Eugenie d’York dans l’extraordinaire collection de sa grand-mère, la reine Élisabeth II pour orner sa coiffure le jour de ses noces avec Jack Brooksbank à Windsor, le 12 octobre 2018.
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Le choix est inhabituel, puisque le diadème est serti de pierres de couleur et qu’il est porté sans voile. Neuf émeraudes, dont une centrale en cabochon de 93,01 carats, sont disposées sur un bandeau serti de centaines de diamants. C’est la maison française Boucheron qui est à l’honneur en ce jour puisque ce diadème a été commandé à Paris, dans cette maison en 1921.
Margaret Greville hérite d'une fortune colossale
À l’origine de la commande se trouve une femme, Margaret Greville, qui a hérité de son père, le plus grand brasseur de bière écossais William McEwan, une fortune fabuleuse. Elle naît en 1863, à Édimbourg où vivent ses parents, mais sa naissance est entourée de mystère car William McEwan et Helen Anderson ne sont pas mariés.

Ils attendront 1885, pour régulariser leur situation, sans doute pour ne pas compromettre les chances de mariage de leur fille unique. L’Angleterre victorienne est prude. Certes, la fortune qu’héritera Margaret, plus de deux millions de livres sterling de l’époque, est colossale, mais elle ne suffit pas à faire oublier entièrement sa naissance.
En 1891, elle déniche le mari idéal en la personne de Ronald Greville, second fils du baron Greville, un aristocrate écossais. Ronald est né un an après Margaret. Il est militaire et a belle allure. Surtout, il n’a pas un sou. Le mariage sera bref. En 1908, Ronald meurt à l’âge de 43 ans. Cinq ans plus tard, William McEwan meurt à son tour faisant de Margaret une des femmes les plus riches d’Angleterre.
La grande passion de Margaret? Les bijoux de chez Boucheron
Pendant près de trente années, sa maison de Charles Street et sa résidence de Polesden Lacey dans le Surrey vont devenir deux des adresses les plus élégantes d’Angleterre. Elle y prodigue une hospitalité généreuse. Et la reine Mary est connue pour venir régulièrement prendre le thé chez elle, car les gâteaux, les sandwiches, les brioches y sont, paraît-il, les meilleurs d’Angleterre.
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La grande passion de Margaret, à part la famille royale, ce sont bien sûr les bijoux. Elle en achète sans cesse. Ses perles sont célèbres, ainsi que ses diamants. Elle choisit généralement les créations d’un joaillier parisien: Boucheron.

Entre octobre 1899 date de sa première visite, et octobre 1925, date de la dernière, son nom revient soixante fois dans les archives de la maison. Tous les ans, elle dépose ses quatre colliers de perles pour les faire renfiler. Elle possède un sautoir de 210 perles, un collier à quatre rangs, un collier à trois rangs, et un collier à un rang.
Le 12 novembre 1901, elle acquiert une couronne de chignon dont l’ornementation composée de feuillages en forme de papyrus, est directement inspirée d’un style antique égyptien qui pourtant n’arrivera en joaillerie que vingt ans plus tard. Ce bijou est transformé plusieurs fois jusqu’en 1921, année durant laquelle il adopte la forme sous laquelle il est connu aujourd’hui.

En effet, à sa mort en 1942, Margaret Greville lègue la totalité de sa collection de bijoux à la reine Elizabeth, future reine mère. Le diadème de diamants sera l’un de ses joyaux favoris jusqu’à sa mort en 2002. Depuis, il est porté par la duchesse de Cornouailles.
Outre ses diamants, Margaret acquiert aussi chez Boucheron un collier de rubis (porté par la reine et la duchesse de Cambridge), deux colliers et une paire de pendants d’oreilles sertis de deux grosses poires de diamants (ces bijoux seront remontés par Cartier dans les années 1930) et surtout, une parure de diamants et d’émeraudes.
Le diadème d’émeraudes n'avait jamais été porté par un membre de la famille royale
En 1911, elle dépose ses deux colliers d’émeraudes chez Boucheron afin qu’ils soient transformés en un seul. En 1923, elle achète deux émeraudes en forme de poire qui sont montées en pendants d’oreilles. Entre-temps, en 1921, elle a acquis son diadème serti de l’énorme émeraude de 93,70 carats.

Tous ces joyaux entrent dans la collection de la reine mère en 1942. Celle-ci portera les diamants, le collier et les boucles d’oreilles d’émeraudes ainsi que les colliers de perles. En revanche, jamais, elle n’arborera le diadème d’émeraudes.
Le bijou disparaît jusqu’au jour où une photo en noir et blanc est redécouverte dans les archives de la maison Boucheron en 2008. Mais il aura fallu attendre encore dix années pour le voir porté à nouveau. À Windsor, le 12 octobre 2018, dans la chevelure de la princesse Eugenie d’York.
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