Comment est née l’idée d’une Cité de l’histoire aux portes de Paris ?
Aussi étrange que cela paraisse, il n’existait pas, dans la capitale et dans ses environs, de lieu spécifiquement dédié à l’histoire, et susceptible d’accueillir un public large et varié. Tout le monde connaît la Cité des sciences et celle de la musique, à la Villette, ou la Cité de l’économie, pour ne citer que ces exemples. J’avais modestement contribué, par ailleurs, à la Cité du vin de Bordeaux (33). Mais la Cité de l’histoire restait à inventer ; voilà qui est fait, grâce aux efforts conjugués d’Amaclio et de votre serviteur. Soulignons qu’il s’agit d’une initiative privée, presque sans apport de fonds publics.
Comment s’est nouée votre collaboration avec la société Amaclio Productions, à l’origine d’illuminations spectaculaires, notamment au Mont-Saint-Michel et aux Invalides ?
Cela fait dix ans — depuis 2012 — que le public parisien peut applaudir, chaque été, le spectacle La Nuit aux Invalides. Dès cette époque est née une amitié avec les concepteurs, tout spécialement avec le président d’Amaclio, François Nicolas. C’est lui qui, au sortir des confinements, m’a proposé d’étudier le principe d’une nouvelle projection monumentale, en intérieur cette fois. J’ai accepté avec enthousiasme. Nous nous sommes mis en quête d’un endroit adapté, et surprise ! C’est en visitant les immenses espaces du socle de la Grande Arche, à la Défense, que nous avons eu, ensemble, l’idée de ce projet un peu fou.

Situer la Cité de l’histoire sous la Grande Arche, n’est-ce pas un pied de nez à la froideur minérale, presque agressive, de ce site emblématique des années 1980 ?
Comme vous avez pu le constater, le décorateur Jacques Garcia, qui nous a fait l’honneur de créer l’ambiance de la Cité, a voulu trancher dès l’entrée avec cette froideur : nos décors se montrent chaleureux, accueillants, je dirais volontiers cosy. C’est exactement ce que nous souhaitions. Pour la scénographie des animations, nous avons eu recours à un autre grand talent, celui de Thierry Rétif, que connaissent les visiteurs du Puy du Fou, par exemple, ou du parc Astérix. Son imagination et sa précision mêlées ont fait merveille. Vous avez sans doute remarqué aussi les 80 silhouettes, vivantes et colorées, de personnages de l’histoire, dues au talent de Kim Roselier. Ce sont elles qui animent, notamment, la librairie-boutique.
Le concept d’"immersion" est devenu incontournable ; quelle définition en donneriez-vous ? Qu’en attendez-vous ?
À la radio et à la télévision, dans mes écrits, mais aussi au théâtre, j’ai toujours essayé de pratiquer ce que certains veulent bien appeler une "vulgarisation intelligente". L’ambition, ici, est de donner au public l’envie d’aller plus loin, en créant des "passages", des "portes d’entrée" riantes en direction d’un passé parfois austère. La Cité, de ce point de vue, est plus qu’une porte ; on doit pouvoir y déceler un grand portail !

À quels mots d’ordre cette vaste entreprise a-t-elle obéi ?
S’il vous fallait n’en retenir que trois… Je dirais — pour le plaisir de la rime — que nous avons voulu cette Cité authentique. Onirique. Et bien évidemment ludique ; j’aimerais que nos visiteurs — de tous âges, de tous niveaux — s’y amusent et passent là du bon temps. Authentique, parce qu’il est important que tout ce qui est dit et montré ici soit factuellement exact. Quant à la dimension onirique, j’espère qu’elle parlera d’elle-même…
Un spectacle sur Notre-Dame avait pris place au sein de vos espaces, avant même que la Cité ne soit aménagée. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
Il s’agit d’une expérience en réalité virtuelle, signée Bruno Seillier et coproduite, l’an passé, par Orange et Amaclio, avec le diocèse et l’établissement public qui reconstruit la cathédrale. Un joyau de modélisation 3D au service de la pédagogie à voir absolument; j’en parle d’autant plus librement que ce n’est pas mon oeuvre.

Est-ce par souci de cohérence, néanmoins, que vous avez choisi Victor Hugo pour inaugurer votre spectacle de projection monumentale ?
En effet, c’était l’idée. Mais ce spectacle n’a pas vocation à rester isolé ; nous travaillons déjà, pour vous donner une idée de la suite, à un programme sur… Cléopâtre ! Dans notre "Ellipse 360°", la projection audiovisuelle bénéficie d’une technologie de pointe ; les images animées s’y accrochent aux éléments d’architecture, le long d’un décor de 70 mètres de développement, haut de 7 mètres. Autant dire que nous disposons d’un outil fantastique pour embrasser, à terme, toute l’histoire du monde.

La Cité veut tout embrasser, mais son parcours permanent — intitulé "La clef des siècles" — demeure centré sur l’histoire de France…
Oui, et j’y tenais ! De même que je tiens à ce cheminement à rebours qui nous fait partir d’aujourd’hui pour nous enfoncer dans l’histoire, de génération en génération, et remonter ainsi aux temps où la France a commencé de porter son nom. J’espère que cette "Clef des siècles" suscitera quelques vocations au sein du jeune public.
Dans le "Couloir du temps", l’immense frise chronologique interactive de 400 dates évoque 25 siècles d’histoire universelle. N’est-ce pas un peu réducteur ? Et la simple phrase explicitant chaque épisode ne risque-t-elle pas de passer pour schématique ?
Avec le président François Nicolas, mon collaborateur Pierre-Louis Lensel et toute l’équipe, nous tenions à mettre en avant la chronologie, car c’est la base — trop négligée dans certains enseignements — de toute démarche historique. Évidemment, résumer 25 siècles à 400 dates, tous continents confondus, relève du pari audacieux, je vous le concède… Mais c’est aussi un moyen — en empruntant à tous les registres : diplomatique et militaire, certes, mais aussi scientifique, artistique, voire quotidien — de maintenir en éveil la curiosité du public, qui plébiscite déjà cet outil interactif et participatif. Et puis, dès que possible, nous ferons naître de nouvelles frises ; pourquoi pas, par exemple, une "chatoyante histoire illustrée de la peinture" ? Le potentiel de la Cité est presque infini ; or, nous n’en sommes qu’à ses tout débuts…
La cité de l'histoire, 1 parvis de la Défense, 92800 Puteaux.
Plus d’informations : 01 47 57 57 27 et www.cite-histoire.com

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