Penhaligon's, le parfumeur de la cour de Grande-Bretagne

Fournisseur de la reine Victoria avant de devenir la maison de parfums la plus chic du Royaume-Uni, Penhaligon's peut s'enorgueillir d'avoir, aujourd'hui encore, les faveurs d'Elisabeth II et de sa famille.

Par Caroline Lazard - 12 février 2018, 16h55

 Walter Penhaligon ouvre son salon à Londres en 1870 et crée son premier parfum, Hammam Bouquet, deux ans plus tard. Il devient rapidement "l'atelier de coiffure à la mode" où se presse l'aristocratie londonienne.
Walter Penhaligon ouvre son salon à Londres en 1870 et crée son premier parfum, Hammam Bouquet, deux ans plus tard. Il devient rapidement "l'atelier de coiffure à la mode" où se presse l'aristocratie londonienne. Service de presse

C'est l'un des secrets les mieux gardés de Buckingham. Se risquer à demander le parfum de la reine Elisabeth vous mène invariablement à la même réponse: "No comment". La recette, jalousement gardée dans les archives du parfumeur Penhaligon's, fait la fierté de cette institution britannique, dont l'histoire est indissociable de celle de la famille royale du Royaume-Uni.

Fournisseur officiel du duc d'Edimbourg et du prince de Galles par attribution des agréments royaux (ou Royal Warrants) -respectivement depuis 1956 et 1988-, Penhaligon's a bâti sa renommée grâce aux membres de la famille royale et leur entourage.

William Penhaligon accueille la fine fleur de la gentry britannique à la fin du XIXe siècle

Lorsque William Penhaligon devient le barbier des Royal Courts et le parfumeur de la reine Victoria en 1891, il n'imagine sans doute pas qu'il fera, aussi, les délices de l'arrière-arrière-petite-fille de la souveraine, 100 ans plus tard.

William Penhaligon était un barbier très réputé au sein de la bonne société londonienne et avait les faveurs de personnages haut placés à la cour. Courtesy of Penhaligon's

Encensé par l'association des fournisseurs officiels de la cour, qui sacre ses deux boutiques "ateliers de coiffure à la mode" dans les années 1890, William Penhaligon se montre pourtant un peu trop hardi face à sa gloire naissante... Profitant des bonnes grâces de la critique, il s'octroie le droit de faire de la publicité dans le Webster's Red Book en utilisant, sans autorisation, les armes de la famille régnante.

Un sacrilège aux yeux de la Royal Warrant Holders Association, qui porte plainte. Le barbier s'en tire avec une amende de 23 shillings et repart conquérir les alcôves de la gentry londonienne. Un incident sans grande conséquence, qui ne l'empêchera pas d'avoir les faveurs des hommes de pouvoir et des lords du royaume.

Walter Penhaligon a repris au début du XXe siècle l'officine créée par son père, William, en 1970. Courtesy of Penhaligon's

En 1902, le 9e duc de Marlborough, Charles Spencer-Chruchill, commande chez Penhaligon's un parfum unique pour célébrer le fief ancestral de sa famille, le palais Blenheim.

Walter, le fils de William, qui a repris l'affaire, imagine pour le duc le Blenheim Bouquet, une essence qui se différencie de ses contemporains fleuris grâce à ses notes fraîches, que le citron et le poivre viennent réveiller. La fragrance connaît un tel succès que la maison décide de la commercialiser. Le succès ne se dément pas, tant et si bien que Blenheim Bouquet figure toujours parmi les meilleures ventes de la marque.

La reine Alexandra offre son premier agrément royal au parfumeur en 1903

Mais la consécration est totale lorsque le parfumeur se voit attribuer, en 1903, son premier mandat royal par la reine Alexandra, l'épouse d'Edward VII, en tant qu'"adepte de produits naturels".

A partir de cette date, Penhaligon's s'impose comme le comble du chic de la parfumerie anglaise, jouant à la perfection avec les codes de l'aristocratie et cultivant soigneusement son pas de côté, refusant d'être "à la mode" pour privilégier le bon goût -et les traditions un brin désuètes- du gentleman britannique.

Créé en 1902, le parfum Blenheim Bouquet figure toujours parmi les meilleures ventes de la marque. Courtesy of Penhaligon's

Au fil des ans, la maison prend également soin de nourrir sa légende en participant, à sa manière, aux grands événements qui jalonnent la vie des membres de la famille royale. En 1977, à l'occasion du jubilé d'argent d'Elisabeth II, sort Jubilee Bouquet, parfum spécialement créé à partir des archives de William Penhaligon pour les 25 ans de règne de la souveraine.

Des attentions qui contribuent encore à renforcer la relation privilégiée qu'entretiennent Buckingham et Penhaligon's. Car aujourd'hui encore, "la boutique de Burlington Arcade livre deux fois par an Buckingham" raconte David Napier, le porte-parole de la marque. Pour le compte du duc d'Edimbourg et le prince de Galles, mais aussi pour Elisabeth II, qui, selon les sources les mieux informées, se ferait offrir son parfum par son époux.

Violette et rose pour la reine, jasmin et gardenia pour Kate

"La reine -dont la fleur préférée est l’œillet- aime beaucoup les essences fleuries, avec de la rose, du jasmin ou de la violette" explique encore David Napier. Il s'arrête là, interdit d'en dire plus. C'est qu'il en a déjà dit beaucoup. Même chose pour le prince Philip et le prince Charles. "Ils portent des parfums plutôt frais, réalisés spécifiquement pour eux et qui proviennent de nos archives." Des commandes spéciales, dont on ne connaîtra pas les détails.

Une publication partagée par Penhaligon's (@penhaligons_london) le 31 Juil. 2017 à 4 :30 PDT

Il est pourtant une personnalité royale qui, en son temps, n'avait pas fait mystère de son parfum. Diana, la princesse de Galles, n'avait en effet jamais caché sa préférence pour Bluebell et son accord floral vert, ses notes de muguet, de jacinthe et de rose. L'évocation "d'un jardin sauvage ou d'une forêt anglaise" pour David Napier, pas peu fier de ces "royal" clients.

Qu'en est-il de Kate? Elle aussi est une adepte de Penhaligon's, nous apprend-on. "Elle préfère les fleurs blanches, comme le gardénia, le lys ou le jasmin". Porterait-elle Gardenia? Ou Lily of the Valley? Nous n'en saurons pas davantage. Les livres de commande de l'illustre parfumeur ne sont pas encore prêts à révéler tous leurs secrets...

www.penhaligons.com

Deux boutiques parisiennes: 34, rue des Francs Bourgeois, Paris 3e et 209, rue Saint-Honoré, Paris 1er. Disponible également au Bon Marché, au BHV et chez Franck & Fils. 

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre, Directrice de la rédaction

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