Les funérailles du prince Philip, une journée si particulière

Une infinie tristesse, une infinie dignité. La grandeur aussi d’une cérémonie dépouillée, quasi monacale. Le samedi 17 avril 2021, au château de Windsor, la BBC diffuse dans le monde entier les obsèques du duc d’Édimbourg, en présence de trente membres de sa famille, pandémie oblige. Dont la reine au premier rang, isolée. Comme un symbole de ce que sera désormais sa vie.

Par Antoine Michelland - 21 avril 2021, 13h07

© Yui Mok/PA Wire /ABACAPRESS.COM

Elle a tant de fois redouté cet adieu ! Tant de fois imaginé chaque minute ! Mais jamais un tel dépouillement. Une présence familiale aussi resserrée par respect des règles sanitaires. Ce n’est pas simplement son bien-aimé que la reine accompagne jusqu’à sa dernière demeure, c’est la souffrance de tous ceux qui, depuis un an, ont perdu un être cher dans ces circonstances sans précédent qu’elle partage.

Le chœur de la chapelle St George de Windsor semble quasi vide, tant la maigre assistance a été émiettée au long des stalles. Élisabeth II est arrivée par le porche Galilée, côté sud, comme tous ceux qui n’ont pas suivi à pied le cercueil en procession. Elle s’est installée près du maître-autel, la tête baissée, recueillie, presque recroquevillée sur elle-même. Jusqu’à ce qu’elle entende le pas lent des Royal Marines portant sur leurs épaules la dépouille du duc d’Édimbourg.

Le choeur de la chapelle St-George pendant les funérailles du prince Philip. © Agence/Bestimage
Le choeur de la chapelle St-George pendant les funérailles du prince Philip. © Agence/Bestimage

Elle tourne la tête, pour le suivre du regard, le voir installé sur le simple catafalque devant elle. Il est là, sa casquette et son sabre de lord grand amiral posés sur son étendard personnel. Il remplit l’espace, une dernière fois, et la reine est auprès de lui, debout.

Il est un peu plus de 15h à Windsor quand s’ouvre le dernier acte d’un cérémonial qui a débuté quatre heures plus tôt. Le cercueil du prince Philip est alors déplacé de la chapelle privée d’Élisabeth II, au château, non loin de ses appartements, jusqu’au Grand Hall, avec ses voûtes néogothiques donnant sur l’Entrée d’État. Déjà, son bien-aimé a cessé de lui appartenir. À 14h, le nouveau lord chambellan, le baron Parker de Minsmere, et le gouverneur du château de Windsor se présentent avec le doyen de la chapelle St George, monseigneur David Conner, pour un temps de prières.

Sur le quadrangle, la grande cour intérieure, en face de l’Entrée d’État, des représentants des trois Armées et des unités particulièrement proches du duc d’Édimbourg se rassemblent pour un dernier hommage. Les musiques des Royal Marines et des grenadiers de la Garde jouent quelques-uns des airs préférés du défunt tandis que les troupes en grand uniforme baissent la tête et que les drapeaux régimentaires sont inclinés vers le sol en signe de deuil.

Le choix impossible des invités 

Maintenant, voici les membres de la famille royale et les parents du prince Philip qui ne participeront pas à la procession. Des voitures les conduisent du château à la chapelle. On reconnaît la duchesse de Cornouailles, la comtesse de Wessex, la duchesse de Cambridge, la princesse Beatrice et son époux, Edoardo Mapelli Mozzi, la princesse Eugenie et Jack Brooksbank, lady Louise Windsor et son frère, le vicomte Severn, Zara et Mike Tindall, lady Sarah Chatto et Daniel Chatto, le duc de Gloucester, le duc de Kent, la princesse Alexandra de Kent, Penelope Knatchbull, comtesse Mountbatten, l’amie la plus proche de Philip et sa cousine par alliance. Puis trois petits-neveux du défunt, le prince Philipp de Hohenlohe-Langenbourg, Bernhard, prince héréditaire de Bade et le prince Heinrich Donatus, landgrave de Hesse-Cassel.

Les duchesses de Cambridge et de Cornouailles au passage du cercueil du duc d'Édimbourg. © Agence/Bestimage
Les duchesses de Cambridge et de Cornouailles au passage du cercueil du duc d'Édimbourg. © Agence/Bestimage

Il faut ajouter les dix membres de la famille royale qui vont suivre dans un instant le cercueil que huit grenadiers de la compagnie de la reine installent sur la Land Rover aménagée sur les dessins et les indications techniques très minutieuses du duc d’Édimbourg.

Trente personnes en tout, dans le respect des consignes sanitaires, au lieu des huit cents invités normalement prévus. Outre souverains et chefs d’État étrangers, outre l’absence du Premier ministre britannique et de tout représentant du monde politique et des corps constitués, il a fallu qu’Élisabeth II consente à des arbitrages cruels. Ni la reine Margrethe de Danemark, ni le roi Constantin de Grèce, ni les souverains espagnols, parents proches du prince Philip, ne peuvent être présents. Même l’un des cousins germains de la reine, le prince Michael de Kent, est absent, tout comme son épouse ainsi que celles des ducs de Kent et de Gloucester. Quant aux dix arrière-petits-enfants d’Élisabeth II et du duc d’Édimbourg, ils sont trop jeunes pour assister à des funérailles. Et la duchesse de Sussex est excusée en raison de sa grossesse.

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Devant la Land Rover transformée en catafalque mobile ont pris place le chef d’état-major des Armées, les plus hauts chefs militaires et le major général commandant la division de la Maison royale. De part et d’autre du véhicule, huit officiers supérieurs représentent les grenadiers de la Garde, les Royal Marines, les Queen’s Royal Hussars, les Rifles, le Corps of Royal Electrical & Mechanical Engineers, la RAF, l’Intelligence Corps, le Royal Regiment of Scotland, toutes unités auprès desquelles le prince Philip jouait un rôle honoraire.

Suivent deux par deux ses enfants, le prince de Galles et la princesse royale, le duc d’York et le comte de Wessex ; puis ses trois petits-fils, le duc de Cambridge, le duc de Sussex et, entre eux puisqu’il est leur aîné et qu’ainsi le veut le protocole, Peter Phillips ; enfin, son neveu, le comte Snowdon et son gendre, le vice-amiral sir Timothy Laurence.

Le prince Charles, très ému, se tient derrière le cercueil de son père. À sa gauche marche la princesse Anne. © Agence/Bestimage
Le prince Charles, très ému, se tient derrière le cercueil de son père. À sa gauche marche la princesse Anne.© Agence/Bestimage

La marche est fermée par le secrétaire privé du duc d’Édimbourg, le général de brigade Archie Miller Bakewell, son officier de protection, ses deux pages et ses deux valets. Il est 14 h45, la Bentley de la reine a rejoint l’arrière du cortège qui se met en marche, musique des grenadiers en tête. Depuis les pelouses Est, une batterie de la King’s Troop Royal Horse Artillery accompagne la procession qui se dirige vers la chapelle St George, à raison d’un coup de canon par minute. Tandis qu’Élisabeth II s’arrête devant le porche Galilée où l’attend le doyen de Windsor, le cortège funèbre poursuit sa route jusqu’à l’entrée Ouest.

Tenue diplomatique 

Face à tous ces uniformes superbes – les Life Guards et les Blues and Royals au présentez-sabre le long des escaliers, les marins occupés à annoncer au sifflet la montée à bord d’un officier pour dire l’arrivée de leur lord grand amiral devant le haut vaisseau de pierre où il reposera désormais –, impossible de ne pas s’étonner de voir princes et princesse en civil, décorations pendantes.

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Car Charles, Anne, Edward et William, sans parler de l’amiral Laurence, seraient tout...

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Adélaïde de Clermont-Tonnerre

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