Leonor et Sophie unies pour l'Espagne

Elle a troqué ses tresses d’enfant contre une coiffure laissant éclater sa blondeur et ses ballerines de petite fille pour des souliers beiges à petits talons. Accompagnée de son père, le roi Felipe, de sa mère, la reine Letizia, et de sa sœur, l’infante Sofia, Leonor d’Espagne vient de faire pour la deuxième année consécutive son arrivée à la cérémonie de remise des prix qui portent son nom et qui récompensent des artistes, des scientifiques et des personnalités œuvrant pour la paix dans le monde.

La reine Sophie, la princesse Leonor, le roi Felipe, la reine Letizia et l’infante Sofia font leur arrivée à l’hôtel de La Reconquista. © FPA Pool/Despotovic

Tout près d’elle, sa grand-mère, la reine Sophie, salue le public. Jamais en quarante ans elle n’a manqué cette cérémonie. Depuis que Leonor incarne la Fondation Princesse des Asturies, la reine émérite y participe désormais en tant que spectatrice, aux premières loges pour soutenir sa petite-fille. Si, l’an passé, la première apparition de la jeune fille était attendue et saluée par tous, l’édition qui vient d’avoir lieu est tout aussi inédite.

Une cérémonie réduite au strict minimum

Les mesures de restrictions liées à la pandémie de Covid-19 ont imposé une cérémonie des plus minimalistes, sans public ni festivité. Au théâtre Campoamor, où l’événement se tient habituellement, s’est substitué l’hôtel de La Reconquista d’Oviedo. "En 2019, les célébrations autour du prix Princesse des Asturies ont réuni plus de 35.000 personnes, précise la directrice de la Fondation Teresa Sanjurjo. Cette année, seules 150 personnes sont conviées à la soirée des lauréats. Malgré cette nouvelle scénarisation, nous avons tenu notre engagement: faire en sorte que les sciences, la concorde et la pensée soient au cœur du débat public".

La quarantième cérémonie de la Fondation Princesse des Asturies se tient dans le salon Covadonga. Les grands héros de la soirée sont les personnes du corps médical, récompensées pour leur bravoure pendant la pandémie. © FPA Pool/Despotovic

Même sans grande pompe, jamais la cérémonie de remise des trophées n’aura été aussi émouvante qu’en cette année. Le jury de la fondation a en effet décidé de décerner le prix de la Concorde à toutes les personnes du corps médical, privé ou public, qui ont risqué leur vie pour lutter contre le coronavirus.

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Dans le salon Covadonga de l’hôtel, des médecins et infirmiers sont là au nom de tous ceux que les Espagnols ont applaudi, chaque soir depuis leurs fenêtres, pour saluer leur bravoure et les encourager: le docteur José Eugenio Guerrero Sanz, directeur de l’unité de soins intensifs de l’hôpital Gregorio Marañón, VeronicaReal, directrice des soins infirmiers de l’hôpital de campagne IFEMA et Teresa López Pernía, qui représente sa fille, le docteur Sara Bravo López, du centre de santé Mota del Cuervo, en Castille, qui a perdu la vie à 28 ans, après avoir été contaminée par le coronavirus.

Le message d'espoir de la princesse Leonor 

Dans le regard de la princesse des Asturies se lit la fierté de pouvoir récompenser ces femmes et ces hommes que le pays considère comme "des héros". Quand elle prononce son deuxième discours au nom de la fondation, Leonor d’Espagne affiche ce calme imperturbable qui a tant séduit le public l’an passé.

Devant un public réduit, la princesse héritière d'Espagne a prononcé un discours saluant la solidarité des Espagnols à l'aune de la pandémie. © FPA Pool/Despotovic

Encore pleine de gratitude pour la gentillesse dont elle a bénéficié alors, la princesse évoque l’année difficile que traverse l’humanité, la force et le sens des responsabilités qu’il a fallu pour faire face à la pandémie. "S’il y a une chose que nous avons apprise ma sœur et moi, c’est le sens des responsabilités. Ce sens des responsabilités passe par le souvenir constant des personnes qui nous entourent, qui nous aiment et que nous aimons". À ces paroles, la fille du roi ne peut s’empêcher de porter son regard vers sa grand-mère.

La reine Sophie, mentor de l'héritière de la Couronne 

Si Leonor ne lui adresse pas de message explicite cette année, le public saisit combien la connivence cimente leur relation. Sophie, depuis sa tribune, mesure la sagesse dont a hérité Leonor. Depuis l’avènement de son fils, Felipe VI, Sophie est toujours là pour soutenir les siens, affichant une détermination sans faille à servir la Couronne. En apparence spectatrice des événements majeurs qui ponctuent la vie du roi et celle de sa petite-fille, elle tient son rôle comme jamais, sans laisser les scandales l’écarter de la vie officielle.

Après le déconfinement en Espagne et malgré l’exil polémique du roi Juan Carlos, la reine Sophie a repris ses activités en faveur des plus démunis, les premières personnes fragilisées par la pandémie de Covid-19. Récemment encore, elle visitait la banque alimentaire d’Albacete et celle de Tolède.

Mine resplendissante, regard d’azur, elle arborait une veste verte qui, dans la minute où elle est apparue, a provoqué de nombreux commentaires sur la Toile. Couleur de l’espoir, le verde en espagnol n’est-il pas en outre l’acronyme "Viva El Rey de España".

Ce 16 octobre, c’est avec la même discrétion qu’elle accompagne sa petite-fille, qui captive l’assistance. Son influence sur celle qui sera un jour reine de plein droit est indéniable. Depuis toujours, au sein de la famille royale, Leonor est perçue comme "la plus grecque" d’entre les siens. Elle montre la même application que sa grand-mère à accomplir une tâche et témoigne au public la même amabilité teintée de discrétion.

Le prix Princesse des Asturies est l’un des grands rendez-vous officiels de Leonor. Sa grand-mère, Sophie d’Espagne, l’accompagne avec affection dans cette formation si singulière. © ABACA

En coulisses, Sophie et Leonor partagent leurs meilleurs instants de complicité pendant leurs traditionnelles vacances à Palma de Majorque, où elles peuvent flâner, ensemble, dans la vieille ville à la découverte de nouvelles boutiques d’artisanat ou assister au festival de musique classique qui se tient près du port.

Pour la princesse des Asturies, Sophie d’Espagne est un soutien de tous les instants, celle sur qui elle entend prendre exemple lors de sa longue formation de future reine d’Espagne. Leonor fêtera d’ici quelques jours son quinzième anniversaire. Chaque année, son agenda officiel s’intensifie. Entre sa première ouverture des Cortès, en 2016, et ses premiers discours à Oviedo et Gérone, l’an dernier, la fille du roi a su dompter sa timidité enfantine.

L'éducation d'une future reine 

Désormais lycéenne dans l’établissement madrilène Santa María de los Rosales, elle a choisi cette année plusieurs options scientifiques: sciences physiques, chimie, biologie et géologie. Dès l’année prochaine, la jeune fille devrait opter pour des cours supplémentaires en littérature et en sciences sociales.

Au lendemain de la cérémonie, la famille royale a rendu visite, comme chaque année, au lauréat du village exemplaire des Asturies. © Andrews Archie/ABACA

Cet enseignement éclectique n’est pas sans rapport avec la formation helléniste suivie par la reine Sophie durant sa jeunesse. Il s’agit aussi d’un pilier de l’éducation de Felipe VI. Le roi Juan Carlos lui-même s’est toujours enorgueilli des brillantes études que son fils avait suivies, lui qui n’a eu de formation que celle qui lui avait été imposée par le général Franco.

À l’issue de ses années de lycée, Leonor s’acheminera certainement vers un cursus universitaire, comme son père, dont une partie se déroulera à l’étranger. L’un des nombreux défis qui l’attend reste toutefois sa formation militaire. Laquelle n’est pas décidée uniquement par la maison royale et sera dévoilée en accord avec le gouvernement espagnol d’ici quelques années.

Les obligations officielles s'intensifient pour Leonor 

Tout au long de son enseignement supérieur, la fille du roi pourrait être suivie par un précepteur, exactement comme son père, qui a eu José Antonio Alcina pour mentor de 16 à 25 ans. D’un point de vue institutionnel, de grandes étapes se dessinent aussi très prochainement pour la princesse Leonor. Cette année, elle pourrait donner quelques audiences et effectuer deux voyages symboliques dès que cesseront les restrictions sanitaires.

Le premier serait une visite à l’étranger. Son père, Felipe, a découvert ainsi la Colombie à 15 ans, lors d’un voyage officiel, pour les 450 ans de la création de Carthagène. Par ailleurs, la future reine d’Espagne continuera d’accompagner ses parents en déplacement dans tout le pays. 2021...